Un financement décisif pour l’éducation congolaise
Dix millions de dollars, soit près de cinq milliards de francs CFA, viennent d’être accordés à la République du Congo par le Partenariat mondial pour l’éducation. Une enveloppe appelée à impulser une transformation en profondeur du système scolaire national.
Depuis Brazzaville, la responsable engagement pays de l’organisme, Jennifer Hofmann, a présenté l’initiative au ministre de l’Éducation, Jean-Luc Mouthou, entouré de représentants de l’Unicef, de l’Unesco et de la Banque mondiale.
Pour les autorités, ce soutien illustre la confiance des partenaires internationaux dans les efforts de modernisation portés par le gouvernement sous la houlette du président Denis Sassou Nguesso.
Sur les dix millions de dollars, près de la moitié sera fléchée vers l’enseignement primaire, où les évaluations nationales mettent en évidence des carences préoccupantes en lecture et calcul.
Le reste financera l’équipement des collèges pilotes, l’élaboration de supports pédagogiques numériques et la mise en place d’un système de suivi-évaluation renforcé.
Vers une loi d’orientation scolaire modernisée
Premier chantier rendu possible, l’élaboration d’une nouvelle loi d’orientation scolaire doit fournir le cadre juridique indispensable aux réformes curriculaires.
Le texte, actuellement en préparation au ministère, prendra en compte les objectifs de scolarisation universelle, l’égalité filles-garçons et l’arrimage du lycée aux besoins du marché national.
Selon Jennifer Hofmann, ce cadre législatif clarifiera les responsabilités de chaque acteur et garantira la pérennité des actions financées.
Le document cadre fixera également la gratuité des fournitures de base au primaire, engageant l’État à maintenir le budget éducation au-delà de 20 % des dépenses publiques.
Révision des programmes : cap sur les fondamentaux
Au cœur de la transformation annoncée figure la révision des programmes, jugés vieillissants et parfois déconnectés des savoirs fondamentaux.
L’accent sera mis sur la lecture, la numératie et les sciences, domaines où les évaluations internationales montrent encore des marges de progression.
Les équipes nationales s’appuieront sur l’expertise de l’Unesco et de l’Unicef pour adapter les contenus aux réalités congolaises, des écoles urbaines de Brazzaville aux salles de classe rurales du Niari.
Pour les zones bilingues, notamment près de la frontière avec la RDC, des livrets en langues nationales accompagneront les nouveaux manuels afin de faciliter la transition vers le français.
Des groupes de travail, regroupant inspecteurs, enseignants expérimentés et chercheurs de l’Université Marien-Ngouabi, passeront au crible chaque séquence d’apprentissage pour vérifier sa pertinence.
Former et accompagner les enseignants
Rénover les textes ne suffit pas : la même énergie devra être consacrée à la formation initiale et continue des enseignants.
Le financement du Pme couvrira des ateliers pédagogiques, la production de guides méthodologiques et la création de centres de ressources départementaux.
Pour Jean-Luc Mouthou, l’objectif est de doter le corps enseignant de compétences actualisées afin que chaque élève, fille ou garçon, progresse dans un environnement d’apprentissage stimulant.
Une plateforme mobile permettra aussi aux instituteurs des zones enclavées de recevoir des micro-modules vidéo et de partager leurs bonnes pratiques en temps réel.
Le pari du numérique sans connexion
Au-delà des programmes, le ministère mise sur le numérique pour réduire les inégalités d’accès au savoir.
La cheffe de délégation de la Fondation MAARIF et de l’entreprise turque Fmss, Juli Buket Zahim, est venue présenter le projet Offline, conçu spécialement pour le continent.
Ce dispositif permet de charger sur tablettes et téléphones des contenus éducatifs actualisables sans connexion Internet, grâce à un serveur local embarqué.
Une phase pilote, prévue dans huit établissements de Pointe-Noire et de la Cuvette, doit débuter dès le premier trimestre prochain avant un éventuel déploiement national.
L’enjeu énergétique des écoles rurales
L’un des obstacles majeurs reste l’accès à l’énergie, notamment dans les localités éloignées des réseaux.
Le système Offline s’appuie donc sur des panneaux solaires capables d’alimenter les équipements numériques sans recourir au courant public.
L’expérience, déjà testée dans plusieurs écoles turques, sera adaptée au contexte climatique congolais à travers un partenariat technique avec l’Agence nationale d’électrification rurale.
Les panneaux, dotés de batteries lithium-fer-phosphate, offriront une autonomie de trois jours, un avantage essentiel durant la saison des pluies souvent marquée par des coupures.
Des techniciens locaux seront formés à la maintenance des installations photovoltaïques, limitant les coûts futurs et créant de l’emploi qualifié dans les communautés concernées.
Une dynamique collective saluée par les partenaires
Les partenaires saluent la vision intégrée portée par Brazzaville, qui associe réforme des contenus, développement professionnel et innovation technologique.
« L’objectif final reste l’amélioration mesurable des apprentissages », souligne Jennifer Hofmann, tandis que la Banque mondiale insiste sur l’importance d’indicateurs pour suivre l’impact dans la durée.
Un rapport annuel public détaillera l’utilisation des fonds et les progrès réalisés par niveau scolaire.
Le Congo-Brazzaville espère ainsi placer son système éducatif en phase avec les ambitions du Plan national de développement 2022-2026, et offrir à sa jeunesse les compétences requises pour participer activement à la diversification économique.
Les observateurs soulignent que la coordination de ces chantiers exigera une gouvernance rigoureuse, mais notent que le pilotage institutionnel s’appuie déjà sur une cellule de suivi au sein du ministère.