Un vote parlementaire sous le sceau de l’orthodoxie budgétaire
En séance plénière, les députés congolais ont approuvé sans surprise le financement de 70,6 millions d’euros négocié avec la Banque mondiale, dont 53,9 millions d’euros de crédit concessionnel et 16,7 millions de don. Signe d’un contexte politique stabilisé, l’opposition institutionnelle a salué « un geste de confiance » tandis que le gouvernement soulignait « l’ancrage irréversible de la discipline de gestion ». Pour Brazzaville, le calendrier tombe à point : la reprise des cours du pétrole, principal moteur de devises, ne suffit pas encore à absorber les séquelles de la crise sanitaire et des chocs exogènes successifs.
La Banque mondiale, catalyseur d’un repositionnement macro-économique
L’opération DPF3 s’inscrit dans une trajectoire entamée en 2021 avec le lancement d’un programme triennal visant à restaurer l’équilibre des finances publiques et à stimuler la croissance inclusive. Selon les données de l’institution de Bretton Woods, le taux de croissance congolais devrait atteindre 4,3 % dès 2026, sous l’effet combiné d’une meilleure exécution budgétaire et d’un rebond modéré de la production pétrolière. « Le Congo fait preuve d’une volonté réformatrice saluée dans la sous-région », commente Albert Zeufack, directeur pays pour l’Afrique centrale (Banque mondiale 2025). Le décaissement rapide du prêt permettra de sécuriser la trésorerie de l’État et de limiter le recours aux avances exceptionnelles de la Banque des États de l’Afrique centrale.
Réformes structurelles et filet social : la double hélice du DPF3
Le ministre des Finances, Rigobert Roger Andely, insiste sur la « convergence entre rigueur budgétaire et exigence sociale ». La moitié des ressources sera orientée vers la rationalisation des exonérations fiscales, la digitalisation de la chaîne de la dépense et la consolidation de la dette intérieure. L’autre moitié alimentera les programmes de transferts monétaires et de cantines scolaires, au bénéfice d’environ 200 000 ménages vulnérables. Les partenaires techniques rappellent que 40 % de la population vit encore sous le seuil de pauvreté monétaire, une statistique que le gouvernement entend réduire de dix points d’ici à 2030.
Synergies régionales et diversification : la quête d’une résilience durable
Au-delà de la gestion de trésorerie, Brazzaville continue de miser sur la diversification économique. Les ressources du DPF3 devraient accélérer la mise en œuvre de la Zone économique spéciale de Pointe-Noire, orientée vers la pétrochimie et l’agro-business. Parallèlement, la modernisation du corridor routier Pointe-Noire-Brazzaville-Bangui, financée conjointement par la Banque africaine de développement et la République populaire de Chine, ouvre un marché de plus de 150 millions de consommateurs. Selon l’économiste Sylvie Ntsangou, « le Congo dispose désormais d’un triangle de croissance combinant ressources naturelles, infrastructures logistiques régionales et appui multilatéral cohérent ».
Perspectives : entre prudence monétaire et ambitions vertes
Les autorités congolaises affirment leur intention de maintenir un déficit budgétaire inférieur à 3 % du PIB et de ramener la dette publique sous le seuil communautaire de 70 % à l’horizon 2027. Dans le même temps, le pays mise sur son potentiel de puits de carbone : avec 22 millions d’hectares de forêts tropicales, il s’est engagé à réduire de 48 % ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2035. Le nouveau financement appuiera l’élaboration d’un cadre législatif sur les crédits carbone, susceptible de générer des recettes additionnelles et de renforcer la diplomatie climatique congolaise. L’équation reste néanmoins délicate, car la Banque mondiale insiste sur la nécessité d’éviter tout surendettement, tandis que les autorités veulent préserver l’investissement public. À Brazzaville, le mot d’ordre demeure une vigilance de tous les instants : consolider le redressement sans brider l’élan réformateur.