Journée mondiale et enjeu numérique
Le 8 septembre 2025, la planète a salué la 59e Journée internationale de l’alphabétisation sous le mot d’ordre « Promouvoir l’alphabétisation à l’ère du numérique ». Ce rendez-vous annuel, piloté par l’UNESCO, examine les chemins menant à un apprentissage inclusif.
En dépit d’avancées réelles recensées à l’échelle internationale, l’égalité d’accès à l’instruction reste fragile. L’outil numérique, en démultiplant les contenus et les interactions, est présenté comme un levier susceptible de réduire les disparités géographiques, économiques ou liées au handicap.
Le thème choisi cette année interroge donc la capacité des États à concevoir des politiques publiques adaptées et, surtout, à les financer durablement. Les gouvernements sont invités à repenser programmes scolaires, infrastructures et formation des enseignants pour tirer parti d’une connectivité toujours plus accessible.
Progrès congolais mesurés
Au Congo-Brazzaville, les autorités rappellent que la scolarisation primaire atteint désormais des taux encourageants, reflet d’investissements constants depuis plusieurs années. Toutefois, l’alphabétisation des adultes et la rescolarisation des jeunes en rupture demeurent des maillons sensibles du système éducatif national.
Des centres d’alphabétisation et de rescolarisation ont été implantés sur l’ensemble du territoire, avec un accent particulier sur les zones périurbaines. Ces structures, gratuites, constituent un filet de sécurité pour des publics sortis trop tôt du circuit classique ou jamais inscrits.
Les rapports officiels soulignent cependant la fragilité budgétaire de l’éducation non formelle. Les lignes affectées à ce sous-secteur représentent une part modeste du budget global, limitant l’achat d’équipements pédagogiques, la maintenance des bâtiments et le recrutement d’un personnel formé aux nouvelles pédagogies numériques.
Obstacles structurels persistants
À ces contraintes matérielles s’ajoute la précarité didactique observée dans plusieurs centres. Les bénévoles et formateurs contractuels y travaillent souvent sans ressources documentaires actualisées, un écueil accentué par l’absence de connexion stable indispensable à l’exploitation régulière de plateformes éducatives.
Le déficit en personnel qualifié constitue un autre enjeu. Même lorsque les infrastructures sont disponibles, il manque des animateurs capables d’accompagner des apprenants adultes, de diagnostiquer leurs niveaux hétérogènes et d’adapter le contenu aux réalités socioprofessionnelles de chaque communauté.
Ces difficultés, déjà documentées l’an passé lors de la 26e session du Conseil national de l’enseignement préscolaire, primaire, secondaire et de l’alphabétisation, demeurent. Les participants avaient alors dressé une cartographie précise des faiblesses, assortie de recommandations devant guider les arbitrages futurs.
La conjoncture économique, marquée par un contexte international volatile, n’a pas permis d’engager tous les correctifs identifiés. Les ajustements budgétaires opérés pour préserver les grands équilibres financiers ont retardé la mise en musique de certaines mesures préconisées.
Le numérique comme levier
Malgré ce tableau contrasté, les opportunités offertes par le numérique suscitent un réel espoir. L’apprentissage assisté par ordinateur, la diffusion de capsules audio en langues locales ou les applications mobiles hors ligne élargissent la palette des ressources accessibles aux néo-alphabètes.
Les spécialistes de l’éducation rappellent que la maîtrise des compétences de base, lecture et calcul, gagne en efficacité lorsque l’environnement intègre supports interactifs et progression individualisée. Le numérique permet de répéter sans stigmatisation et de mesurer objectivement la progression.
Pour les apprenants adultes, souvent engagés dans une activité économique, les formats flexibles sont déterminants. La possibilité de consulter des leçons le soir, via des terminaux partagés, réduit le coût d’opportunité et limite les abandons qui pénalisent les cohortes précédentes.
Le thème 2025 insiste aussi sur la sécurité en ligne, question cruciale lorsque les publics visés découvrent simultanément lecture et navigation web. Des modules d’initiation à la protection des données et à l’identification des contenus fiables se généralisent progressivement dans les ateliers.
Partenariats au service de l’inclusion
La coopération avec l’UNESCO illustre le potentiel des partenariats. À Ouenzé, dans le 5e arrondissement de Brazzaville, une salle multimédia est mise à disposition depuis cinq ans pour des jeunes filles mères déscolarisées, offrant un tremplin vers une meilleure insertion socioprofessionnelle.
Ce projet d’alphabétisation fonctionnelle et numérique démontre qu’un accès encadré aux technologies favorise la confiance et l’autonomie. Les bénéficiaires, après avoir consolidé lecture et calcul, apprennent à utiliser des suites bureautiques ou à accomplir des démarches administratives en ligne.
Perspectives de la 27e session
La prochaine 27e session du Conseil national, annoncée pour ce mois-ci, devrait revenir sur ces expériences et mesurer l’écart séparant objectifs et réalisations. Elle offrira également une tribune pour définir des indicateurs précis, indispensables au suivi transparent des réformes.
Dans l’attente de ses conclusions, les acteurs éducatifs saluent la volonté réaffirmée des pouvoirs publics d’intégrer l’alphabétisation à leur stratégie numérique. Ils demeurent convaincus qu’une synergie entre financement soutenu, appui international et innovations locales placera bientôt l’inclusion au cœur du développement.
Les observateurs rappellent pourtant que le numérique n’est pas une solution miracle. Sans électricité fiable, sans maintenance régulière des équipements et sans contenus adaptés aux cultures locales, les plateformes risquent de devenir des vitrines inactives. La planification intégrée reste donc essentielle. La formation continue des formateurs suivra.