Brazzaville au cœur de la sécurité phytosanitaire
La capitale congolaise accueille, du 26 au 29 août 2025, un atelier panafricain dédié à la sécurité phytosanitaire, réunissant une quarantaine d’experts issus de plusieurs pays. Durant quatre jours, Brazzaville devient le centre régional d’une réflexion stratégique sur la santé des végétaux.
Cet événement, organisé par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture et la Convention internationale pour la protection des végétaux, constitue une étape cruciale pour harmoniser les normes qui guident la circulation des produits agricoles et la prévention des organismes nuisibles.
Un enjeu vital pour l’alimentation africaine
Dans un contexte où l’Afrique ambitionne de renforcer son intégration commerciale, la santé des plantes apparaît comme un maillon essentiel de la souveraineté alimentaire. Les experts congolais soulignent que des normes fiables ouvrent les marchés tout en consolidant la résilience des systèmes agricoles locaux.
« Les végétaux représentent 80 % de notre alimentation et produisent 98 % de l’oxygène que nous respirons », rappelle Pascal Robin Ongoka, directeur de cabinet du ministre congolais de l’Agriculture. Selon lui, la perte annuelle de 40 % des cultures vivrières reste un défi majeur.
Normes internationales en discussion
L’atelier a pour objectif principal d’examiner plusieurs projets de normes internationales. Les participants étudieront l’évaluation des risques, les procédures d’inspection et les protocoles de certification qui doivent garantir un commerce fluide et sûr, sans compromettre les équilibres écologiques.
Les délégations proviennent de zones agro-climatiques variées, du Sahel aux grands lacs d’Afrique centrale. Cette diversité enrichit la discussion, car les ravageurs ne connaissent pas les frontières. Une approche concertée est jugée indispensable pour limiter leur propagation et réduire les pertes économiques.
Le rôle moteur de la FAO et de la CIPV
Brazzaville, qui a déjà accueilli des sommets sur la forêt du Bassin du Congo, s’appuie sur son expérience diplomatique pour faciliter les convergences. Le ministère congolais de l’Agriculture souligne que le pays souhaite contribuer à la définition d’un cadre continental consensuel et applicable.
La FAO estime que chaque dollar investi dans la prévention des ravageurs génère jusqu’à dix dollars d’économies en pertes évitées. Pour les États africains, cette équation constitue un argument budgétaire solide, surtout dans un contexte où la lutte contre l’insécurité alimentaire mobilise déjà d’importantes ressources.
L’implication congolaise stratégique
Au-delà de la dimension agricole, les phytopathologies compromettent les écosystèmes et la biodiversité. Les spécialistes notent que l’introduction d’espèces invasives peut menacer les forêts tropicales, joyaux environnementaux du Congo-Brazzaville, et réduire la capacité de séquestration carbone indispensable à l’atténuation climatique.
Les représentants du secteur privé, notamment les exportateurs de fruits, suivent avec attention la révision des protocoles d’inspection. Un cadre commun réduit les retards portuaires, limite les rejets et sécurise les investissements. L’efficacité logistique constitue un levier majeur de compétitivité pour les entreprises congolaises.
Des retombées économiques et commerciales
Parallèlement, les organisations paysannes espèrent que les futures normes prendront mieux en compte la réalité des petits exploitants. La formation des producteurs sur les bonnes pratiques phytosanitaires demeure un préalable pour que les modes de culture traditionnels s’accordent avec les exigences internationales.
Le secrétariat de la CIPV rappelle que l’approche participative reste la clé. Chaque pays soumet ses observations, puis un consensus est recherché afin d’envoyer les textes au Comité des normes. Le processus garantit transparence et légitimité, deux conditions essentielles pour une adoption future sans heurts.
Sensibilisation et mise en œuvre régionales
Pour le Congo-Brazzaville, l’atelier constitue aussi une opportunité de renforcement des capacités. Des sessions techniques sont prévues pour le personnel des services phytosanitaires nationaux, notamment sur les méthodes de diagnostic précoce, de surveillance du territoire et de gestion des alertes.
Les participants visiteront le laboratoire central de l’Institut national de recherche agronomique, récemment modernisé avec l’appui de partenaires internationaux. Cette immersion permettra d’illustrer les progrès réalisés par le Congo-Brazzaville dans le monitoring des pathogènes et l’analyse des résidus de pesticides.
À l’issue des travaux, un rapport de recommandations sera validé. Les normes proposent des seuils précis pour les inspections, mais aussi des guides de formation destinés aux agriculteurs. Les représentants africains comptent soumettre ces conclusions lors de la prochaine réunion mondiale de la CIPV.
Perspectives et attentes post-atelier
Plusieurs observateurs économiques estiment que l’application rigoureuse de ces standards pourrait accroître de 15 % la valeur des exportations agricoles congolaises en cinq ans. En renforçant la confiance des importateurs, Brazzaville diversifie ses recettes hors pétrole et consolide son positionnement sous-régional.
Face aux défis climatiques et démographiques, l’Afrique semble mesurer l’urgence d’une alliance autour de la santé des plantes. Brazzaville offre un terrain d’inspiration, illustrant l’idée que la coopération scientifique peut soutenir la croissance, la sécurité alimentaire et la protection environnementale.
Les jours de discussions qui s’ouvrent augurent donc de décisions structurantes. Elles devront, pour être pleinement efficaces, s’accompagner d’un engagement financier durable et d’un suivi rigoureux. Les prochains semis diront si la graine semée à Brazzaville porte ses fruits.