Une proposition surgie en pleine séquence électorale
Le 12 décembre 2025, Brazzaville pourrait accueillir un colloque national de l’opposition congolaise consacré à la gouvernance électorale. L’initiative, portée par l’ancien ministre des finances Mathias Dzon et par l’Alliance pour la république et la démocratie, arrive alors que la campagne présidentielle doit débuter sous peu.
Les organisateurs invoquent la lettre ouverte adressée le 2 juillet 2025 au chef de l’État pour justifier la tenue d’un tel forum, présenté comme une « contribution constructive » au débat national. Ils estiment qu’un diagnostic collectif sur les règles du jeu électoral consoliderait la confiance avant le double tour prévu les 17 et 22 mars 2026.
Un front de l’opposition toujours fragmenté
Le collectif de 37 signataires réunit des personnalités de sensibilités variées, de l’Union patriotique pour le renouveau national à la diaspora. Ce périmètre reflète la pluralité d’une opposition qui, depuis 2002, peine à parler d’une seule voix lors des grands rendez-vous électoraux.
Pourtant, plusieurs formations jugent que le mode de préparation ne garantit pas un consensus véritable. Clément Miérassa, du Rassemblement pour le Congo, rappelle avoir déjà produit un document sur la gouvernance électorale et refuse, selon ses termes, d’« entériner un schéma ficelé ailleurs ».
Les ressorts de la démarche Dzon
Le thème proposé embrasse cinq axes : gouvernance des scrutins, crise multidimensionnelle, sécurité, intolérance politique et dérive autoritaire présumée. Les organisateurs souhaitent aboutir à un projet de loi électorale « impartiale et impersonnelle » et à une commission indépendante supervisant l’ensemble du processus (selon les initiateurs).
Mathias Dzon insiste sur la dimension pacifique de la démarche. « Il ne s’agit pas de contester le calendrier officiel, mais de proposer des ajustements garantissant l’adhésion de tous », confie-t-il à son entourage. Il affirme vouloir travailler dans le respect des institutions, afin que les recommandations puissent être examinées sereinement.
Suspicions et réserves internes
Malgré cet engagement, certains responsables redoutent une manœuvre visant à retarder la présidentielle. Ils soulignent qu’une révision en profondeur des textes, à trois mois du scrutin, exigerait un consensus politique et parlementaire difficile à réunir sans rallonger les délais.
Jean-Félix Demba-Ntélo, du Front de l’opposition congolaise, refuse de se sentir « pris en remorque ». Il considère que le colloque gagnerait en crédibilité si sa préparation était confiée à un comité ad hoc, intégrant équitablement toutes les tendances.
Le dialogue direct entre les différentes composantes reste cependant compliqué. Des tentatives de médiation menées par des acteurs de la société civile n’ont, pour l’heure, pas permis de rapprocher les positions.
Le facteur temps avant mars 2026
Les autorités ont fixé depuis plusieurs mois les dates du scrutin. Dans ce cadre, toute hypothèse de report est décrite comme un précédent risqué par des juristes indépendants, qui rappellent que le mandat présidentiel obéit à des délais constitutionnels clairs.
Nombre d’observateurs considèrent toutefois qu’un débat technique sur l’organisation des opérations de vote reste possible sans modifier le calendrier. Les organisateurs du colloque assurent qu’ils travaillent justement sur des propositions susceptibles d’être mises en œuvre rapidement ou après l’échéance, afin d’asseoir la stabilité institutionnelle.
Institutions et arbitrages attendus
La promulgation d’une éventuelle nouvelle loi électorale relève du Parlement, tandis que l’administration territoriale pilote la logistique des scrutins. Les porteurs de l’initiative savent donc qu’ils devront convaincre ces organes s’ils veulent transformer leurs recommandations en textes normatifs.
En coulisses, les partisans du colloque soulignent la disponibilité affichée par plusieurs parlementaires à écouter les différentes parties. À leurs yeux, cette ouverture prouve que les institutions congolaises demeurent attentives aux propositions visant à renforcer la transparence et la sérénité du jeu démocratique.
Que restera-t-il de l’appel au rassemblement ?
Si les réticences persistent, le colloque pourrait finalement ne réunir que les partis membres de l’A.R.D. Mathias Dzon reconnaît ce risque, mais préfère retenir le principe de « la chaise vide profite rarement » : chaque participant absent laisserait son influence à d’autres.
Pour les analystes, le résultat immédiat du colloque importe moins que la dynamique enclenchée. Même limité, un échange formalisé autour d’un texte commun pourrait devenir un précédent structurant pour les consultations futures.
En attendant, l’opinion observe avec intérêt la capacité de l’opposition à harmoniser ses ambitions. À mesure que la campagne se rapproche, la question centrale demeure : la refonte des règles électorales peut-elle naître d’une union que chaque jour, paradoxalement, rend plus nécessaire et plus incertaine ?
