Un tatami inédit au cœur de Brazzaville
Autour du tatami dressé dans le gymnase du lycée de la Révolution, le 13 octobre, la clameur ne faiblit pas. Jeunes en tenue immaculée, parents intrigués et officiels sportifs assistaient au premier camp d’entraînement public de combat corps à corps jamais organisé en République du Congo.
L’initiative émane de l’organisation non gouvernementale Globus, qui entend installer durablement cette discipline russe à Brazzaville. La séance inaugurale a permis de dévoiler un calendrier dense : cours quotidiens, stages spécialisés et, à moyen terme, participation aux compétitions continentales déjà bien rodées.
Un héritage des forces spéciales russes
Né dans les services spéciaux de l’ex-URSS, le combat corps à corps associe karaté, judo, taekwondo et autres arts martiaux pour constituer un système global. « La fédération internationale est opérationnelle depuis 2006 et compte aujourd’hui soixante-cinq pays membres », rappelle la coach Anastacia Aliochina.
À l’échelle africaine, la discipline a déjà connu un premier grand rendez-vous avec le championnat continental récemment accueilli par le Maroc. L’arrivée de l’école congolaise signifie, pour ses promoteurs, que le centre du continent s’ouvre à son tour à cette pratique exigeante.
Des entraîneurs de haut niveau à Brazzaville
Pour convaincre les athlètes locaux, Globus s’est adjoint les services d’entraîneurs russes aguerris. Sergueï Machuline, grand maître et sélectionneur national de Russie, dirige la salle. « Les statistiques montrent une forte motivation de la jeunesse congolaise », constate-t-il, entre deux démonstrations de clés et de projections.
Sous sa conduite, les premiers élèves apprennent les bases : posture, respiration, gestion de distance. Chaque atelier se termine par un salut au drapeau congolais, signe de l’enracinement local de l’école, puis un salut au drapeau russe, rappel de la filiation technique.
Les organisateurs ambitionnent de certifier rapidement des coachs congolais afin d’assurer la relève et d’essaimer dans d’autres départements. Des évaluations régulières sont prévues pour jalonner la progression des pratiquants.
Formation gratuite, enthousiasme palpable
Le modèle économique se veut inclusif : inscription gratuite, prêt de kimonos lors des premières séances et accès illimité aux créneaux d’entraînement. « Le dynamisme des entraîneurs nous pousse à donner notre maximum », confie un jeune apprenant déjà familier du karaté et séduit par la dimension plurielle du nouveau sport.
Dans les gradins, plusieurs parents disent apprécier la rigueur du cadre pédagogique, jugé propice à développer discipline personnelle et confiance en soi. Les séances se déroulent en fin d’après-midi, un horaire choisi pour ne pas empiéter sur le temps scolaire.
Globus espère franchir, dès la première année, le cap symbolique des cinq cents licenciés. L’ONG inscrit son action dans la dynamique nationale de promotion de la pratique sportive chez les jeunes.
Une coopération russo-congolaise multiforme
La fondatrice de Globus, Yulia Berg, voit dans ce projet un prolongement naturel du dialogue instauré depuis plusieurs années entre Moscou et Brazzaville. « Nos chefs d’État multiplient les rencontres de travail ; le sport enrichit désormais un partenariat qui couvrait déjà la haute technologie, la science et l’éducation », souligne-t-elle.
Les autorités congolaises accueillent favorablement l’initiative, perçue comme un vecteur d’échanges interculturels. Des stages croisés pourraient, à terme, permettre à de jeunes Congolais de s’entraîner en Russie, avant de revenir transmettre leur expérience.
Sur le plan diplomatique, l’école illustre la volonté de diversifier les liens internationaux du Congo-Brazzaville, tout en offrant à la population un accès concret à des savoirs sportifs mondialement reconnus.
Vers une reconnaissance olympique
En parallèle des cours, Globus milite pour l’entrée du combat corps à corps au programme des Jeux olympiques. Les responsables de la fédération internationale misent sur la pluralité technique et la sécurité des règles pour rallier des soutiens.
Brazzaville pourrait jouer un rôle pilote en Afrique centrale, en accueillant des compétitions régionales destinées à affiner le cahier des charges olympique. L’idée séduit déjà plusieurs fédérations nationales, désireuses d’offrir de nouvelles perspectives à leurs athlètes.
Entre ambition internationale et engagement local, l’école de combat corps à corps s’est donné une double mission : forger des champions et renforcer les passerelles culturelles entre la Fédération de Russie et la République du Congo. Les premiers pas, salués par la ferveur des élèves, laissent augurer d’une progression rapide.