Une confirmation officielle qui rebat les cartes du calendrier national
La Fédération congolaise de football a scellé, par une correspondance datée du 8 juillet et signée de son secrétaire général Badji Mombo Wantété, le sort de l’édition 2025 de la Coupe du Congo. Cette notification, faisant suite à la décision communiquée le 3 juillet par la Direction générale des sports, prolonge d’un an le précédent instauré en 2024 : l’annulation pure et simple de la compétition inscrite, depuis 1985, au cœur des festivités de l’indépendance. L’annonce, sobre dans la forme, souligne néanmoins le caractère « national » de la mesure et enjoint les Ligues à réajuster leurs calendriers sans délais.
Dans un contexte marqué par la rationalisation de la dépense publique et la redéfinition des priorités de politique sportive, plusieurs sources institutionnelles avancent la nécessité de concentrer l’effort budgétaire sur la réhabilitation de stades, la sécurité des grands rassemblements et le financement des sélections engagées dans les éliminatoires continentales. Autant d’arguments qui, tout en s’inscrivant dans une logique de bonne gouvernance, rappellent que la Coupe du Congo mobilise des ressources humaines et financières considérables lorsqu’elle se dispute simultanément dans plusieurs départements.
Une compétition emblématique à la portée symbolique toujours vivace
Instituée par décret présidentiel à la fin de l’année 1985, la Coupe du Congo fut pensée comme un vecteur d’unité nationale, un espace de brassage socioculturel et un événement de prestige encadré, chaque 15 août, par la présence du chef de l’État ou de son représentant. Lien direct entre pouvoir symbolique et pratique sportive, la remise du trophée par le président de la République matérialise, depuis près de quatre décennies, la centralité du football dans l’imaginaire collectif congolais.
L’annulation répétée n’entame pas entièrement cette dimension, soulignent plusieurs historiens du sport : « Le rituel de la Coupe conserve sa charge identitaire, même lorsqu’il s’interrompt », insiste l’universitaire Félix Mouandzibi. Selon lui, la mémoire des finales mémorables – du succès inaugural de l’Étoile du Congo en 1986 à celui des Diables Noirs en 2023 – demeure un capital émotionnel susceptible de susciter un rebond dès que les conditions organisationnelles seront réunies.
Infrastructures et logistique : le défi d’une compétition à géométrie variable
Les contraintes soulignées par les autorités renvoient principalement à l’état disparate des infrastructures. Bien que Brazzaville dispose du complexe Massamba-Débat, plusieurs stades départementaux nécessitent encore des travaux de mise aux normes, qu’il s’agisse de la pelouse synthétique, de l’éclairage homologué ou des dispositifs de sécurité. La Fédération a, depuis deux ans, engagé un audit technique afin d’anticiper la programmation future de matches à élimination directe, audit dont les conclusions, selon nos informations, plaident pour une montée en gamme graduelle plutôt qu’un calendrier précipité.
Au-delà de la brique et du béton, la logistique des déplacements constitue une autre variable critique. Le format historique, reposant sur des rencontres aller-retour jusqu’aux quarts de finale, induit des coûts de transport élevés pour des clubs dont le modèle économique reste fragile. La pandémie de Covid-19 a, par ailleurs, laissé des traces dans la trésorerie de nombreuses formations, amenuisant leur capacité à contribuer financièrement à l’organisation. Dans ces conditions, la sagesse institutionnelle consiste peut-être à différer la compétition afin de préserver son niveau d’exigence et son aura.
Entre déception mesurée et sens de la responsabilité, la parole des acteurs
Les réactions recueillies auprès des dirigeants de clubs trahissent un mélange de regret et de compréhension. « Nous perdons une vitrine, mais nous gagnons du temps pour consolider notre projet sportif », confie le président d’un club de Pointe-Noire. Du côté des joueurs, l’annulation prive certains talents de visibilité nationale, mais elle ouvre également des créneaux pour allonger la saison des championnats fédéraux, souvent compressée par la concomitance des compétitions.
La sphère des supporters, très active sur les réseaux sociaux, oscille entre nostalgie et impatience. On y réclame davantage de concertsation autour d’un nouveau format, éventuellement régionalisé en phases préliminaires, qui limiterait les frais tout en maintenant la ferveur. Pour l’heure, la Fédération se dit à l’écoute de ces propositions, tout en rappelant que toute réforme « doit préserver l’intégrité sportive et l’équité de traitement entre les équipes ».
Quel horizon pour la Coupe du Congo après l’année blanche 2025 ?
À court terme, la priorité affichée par les pouvoirs publics porte sur la finalisation des chantiers de modernisation des enceintes de Dolisie et d’Oyo, présentés comme des leviers de déconcentration de l’offre sportive. L’option d’une reprise en 2026, avec un format ajusté et des partenariats renforcés avec le secteur privé, circule dans les cercles décisionnels. Elle s’accompagnerait d’une stratégie de diffusion audiovisuelle élargie visant à accroître les recettes commerciales et à valoriser les talents locaux.
Sur le moyen terme, plusieurs experts militent pour l’institutionnalisation d’un Fonds de soutien à l’organisation des compétitions nationales, abondé par une part des revenus liés aux rencontres internationales et aux droits télévisuels. Une telle mécanique contribuerait à stabiliser la Coupe du Congo, tout en consolidant la place du pays dans l’échiquier du football d’Afrique centrale. En somme, l’annulation de 2025 apparaît non comme la fin d’un cycle, mais comme l’amorce d’une réflexion approfondie sur la gouvernance sportive, réflexion qui pourrait, à terme, fortifier l’événement et accroître sa portée diplomatique.