Un CSLC renouvelé et stratégique
La session inaugurale du Conseil supérieur de la liberté de communication, tenue les 8 et 9 septembre à Brazzaville, a installé une nouvelle dynamique institutionnelle. Sous la houlette de son président Médard Milandou Nsonga, l’organe entend désormais harmoniser liberté d’expression, responsabilité et crédibilité dans l’espace public national.
Réunis pendant deux jours, les hauts conseillers ont, pour la première fois de la mandature 2023-2027, posé les fondations réglementaires de leur action. Règlement intérieur, manuel de procédures et dispositif financier ont été adoptés à l’unanimité, balisant la route des quatre prochaines années.
Les textes fondamentaux adoptés
Le communiqué final souligne que ces textes constituent une base solide mais évolutive, appelée à s’enrichir d’ici la fin de l’année. Les conseillers estiment indispensable de prendre en compte les mutations numériques qui bouleversent la production, la diffusion et la consommation des contenus médiatiques.
Parmi les dispositions actées figure la dénomination actualisée des commissions spécialisées, reflet de problématiques contemporaines comme la cybersécurité ou l’infographie. Chaque commission devra produire, avant mars prochain, un cahier de recommandations afin de garantir la cohérence de la régulation à l’ère des réseaux sociaux.
Régulation tournée vers les nouveaux médias
Le texte adopté précise également les modalités d’accréditation des journalistes étrangers. Des procédures simplifiées, mais non dénuées d’exigences éthiques, viseront à concilier ouverture internationale et préservation des impératifs sécuritaires, notamment dans les zones frontalières sensibles.
Une attention particulière est accordée aux droits et obligations des membres du Conseil. Leur devoir de réserve est réaffirmé avec vigueur afin d’éviter toute confusion entre expression personnelle et prise de position institutionnelle, gage de neutralité auprès des acteurs politiques et du public.
Gouvernance et transparence financière
Sur le plan financier, les conseillers ont entériné la séparation rigoureuse entre l’ordonnateur et le comptable, conforme aux normes de la Cour des comptes. En cas d’empêchement du président, le vice-président devient administrateur délégué des crédits, garantissant la fluidité de la dépense.
Si les deux têtes de l’institution étaient simultanément indisponibles, l’ordre de préséance des conseillers permettra de désigner un gestionnaire intérimaire. Cette précaution, saluée par plusieurs observateurs, établit un filet de sécurité contre les blocages budgétaires qui ont parfois fragilisé d’autres organismes publics.
Assainir le paysage médiatique national
Au-delà de l’architecture juridique, la session a ouvert un chantier plus large : la révision des textes fondamentaux régissant l’audiovisuel et la presse écrite au Congo-Brazzaville. Les hautes instances souhaitent parvenir, à moyen terme, à un code unifié intégrant télévision, radio, presse et contenu numérique.
L’objectif affiché est d’assainir un secteur confronté à la prolifération de supports non déclarés et à la montée des discours haineux en ligne. Le Conseil mise sur la responsabilisation des éditeurs, l’auto-régulation encadrée et, en dernier ressort, un pouvoir de sanction proportionné.
Formation et cadre économique des acteurs
Dans le même esprit, un module de formation continue destiné aux journalistes sera lancé en coopération avec l’Université Marien-Ngouabi. Les sessions mettront l’accent sur la vérification des faits, la sécurité numérique et la protection des sources, trois piliers jugés essentiels par les conseillers.
La réforme pourrait également clarifier le régime de diffusion des contenus audiovisuels étrangers, souvent rediffusés sans autorisation. Une grille tarifaire unifiée, adossée à un mécanisme de déclaration en ligne, figure dans le projet de texte soumis à concertation auprès des opérateurs.
Réactions des professionnels et de la société civile
Les représentants des télévisions privées, conviés comme observateurs, ont salué l’accent mis sur la transparence, tout en plaidant pour des délais de mise en œuvre réalistes. Selon eux, l’harmonisation réglementaire doit rimer avec viabilité économique sous peine d’accroître la concentration du marché.
Du côté des organisations de la société civile, la vigilance reste de mise. Elles soulignent que l’indépendance éditoriale dépendra autant des textes que de leur application, notamment lors des périodes électorales où la pression sur les rédactions s’intensifie traditionnellement.
Engagement institutionnel et feuille de route
Interrogé à l’issue des travaux, Médard Milandou Nsonga a rappelé la mission « de garantir un débat démocratique apaisé, adossé à des règles comprises par tous ». Le président du CSLC a assuré que chaque étape de la réforme serait soumise à une large consultation nationale.
La fin de la session inaugurale marque donc une étape charnière. Les observateurs attendent désormais le calendrier précis des consultations et l’avant-projet de loi qui traduira ces orientations en dispositions contraignantes, pierre angulaire d’un écosystème médiatique modernisé, inclusif et résolument tourné vers l’avenir.
Un lien renforcé avec la diaspora
Pour les Congolais de la diaspora, très actifs sur les plateformes sociales, le chantier réglementaire constitue une occasion de renouer avec les médias nationaux. Le CSLC souhaite faciliter les collaborations transfrontalières, suivant l’idée qu’une couverture plurielle du Congo-Brazzaville se bâtit aussi depuis Paris, Montréal ou Abidjan.
Suivi public des indicateurs médiatiques
Un comité interne de suivi publiera, tous les semestres, un tableau d’indicateurs : temps d’antenne, diversité des sources, part de contenus locaux. Ces données, mises en ligne, offriront aux citoyens un baromètre clair des progrès accomplis et des défis restants dans la gouvernance médiatique. Une note synthétique sera débattue publiquement.