Une mobilisation rare dans la capitale congolaise
Depuis le 21 septembre 2025, les unités de la Direction générale de la Sécurité présidentielle sillonnent Brazzaville et plusieurs villes du Congo-Brazzaville. Leur ordre de mission : démanteler les bandes armées de « bébés noirs » et « kulunas » qui imposaient leur loi dans la rue.
Cette action fait suite au décret 2025-390 du 18 septembre, texte qui redéfinit les attributions de la DGSP et confirme sa capacité à participer à la défense opérationnelle du territoire. En trois jours, le corps d’élite passait de la théorie au terrain.
Redonner confiance aux quartiers populaires
À Talangaï, Mikalou ou Ouenzé, les riverains saluent bruyamment les patrouilles. Beaucoup avouent qu’ils en étaient venus à organiser des rondes d’autodéfense. L’intervention officielle met fin aux lynchages improvisés et restaure la primauté de l’État.
« Nous transmettons chaque soir les noms et photos des chefs de gang », confie un chef de quartier. Cette coopération, souhaitée de longue date par les autorités, accélère les interpellations et délégitime les repaires criminels.
Le cadre légal consolide l’action
Le décret 2025-390 précise que la DGSP peut « lutter contre toute menace visant la stabilité des institutions et la sécurité des biens ». Adossée au ministère de l’Intérieur, l’unité dispose ainsi d’un fondement juridique incontestable pour épauler police et gendarmerie.
Les spécialistes rappellent qu’un précédent texte, le décret 2023-52, rattachait déjà la Sécurité présidentielle à l’architecture régalienne. L’opération actuelle illustre la mise en œuvre concrète de cette chaîne de commandement rationalisée.
Une stratégie d’intervention graduée
Le général Serge Oboa, qui dirige la DGSP, a choisi l’effet de surprise : descentes simultanées, checkpoints mobiles et contrôle des axes menant aux marchés. Les équipes agissent de nuit, période privilégiée des gangs, pour rompre leurs habitudes.
Si les forces spéciales disposent d’armements adaptés, elles privilégient l’interpellation lorsque la reddition est possible. Plusieurs dizaines de suspects ont déjà été conduits devant la justice, preuve d’une volonté d’enrôler la procédure plutôt que la force brute.
Synergie avec la police judiciaire
Les services d’investigation fournissent aux militaires des fiches anthropométriques et des historiques de garde à vue. Cette base de données accélère l’identification des multirécidivistes et limite les risques d’erreur.
Officiers de police judiciaire et juristes suivent par ailleurs les opérations pour garantir la traçabilité des saisies et la notification des droits. La coordination, discrète mais réelle, évite toute concurrence stérile entre services.
Un précédent : l’urgence sanitaire de 2023
La population se souvient qu’en 2023, lors de la grève de l’entreprise de propreté Averda, la même DGSP avait participé à l’évacuation des montagnes d’ordures. L’épisode avait montré sa capacité logistique et renforcé la confiance mutuelle avec les habitants.
Pour nombre de Brazzavillois, l’opération actuelle s’inscrit dans cette continuité : une force publique mobilisée pour résoudre des crises spécifiques, sous l’impulsion du ministre de l’Intérieur Raymond Zéphirin Mboulou.
Le coût humain des bandes armées
Les récits de victimes abondent : étudiants blessés à la machette, commerçantes dépouillées à l’aube, familles frappées lors de veillées funèbres. Chaque témoignage rappelle que le phénomène n’était plus seulement délinquant, mais quasi terroriste.
Devant cette escalade, nombre d’analystes estiment que l’usage d’unités spécialisées apparaît proportionné au danger. La priorité reste la sauvegarde du droit fondamental à la vie, souvent oublié dans les débats abstraits sur la force légitime.
Respect des droits et fermeté assumée
Les commandos appliquent des règles d’engagement strictes : sommations, tir dissuasif, puis neutralisation si la menace persiste. Les autorités insistent sur l’enregistrement systématique des opérations par caméras embarquées pour prévenir tout abus.
Le porte-parole de la DGSP rappelle que « la protection des personnes commence par la neutralisation des agresseurs ». Dans les centres de réinsertion, des places sont prévues pour les mineurs qui acceptent de quitter la spirale de la violence.
Premiers résultats tangibles
En moins de quinze jours, plusieurs zones rouges ont retrouvé une circulation fluide. La messe matinale de certaines paroisses, suspendue par crainte d’agressions, a repris. Les « mama ya zando » peuvent rejoindre les dépôts avant l’aube sans escorte improvisée.
Selon une source sécuritaire, la criminalité nocturne a baissé de 40 % dans les arrondissements concernés. Les enquêteurs poursuivent néanmoins la traque, estimant que des poches résiduelles se sont réfugiées en périphérie.
Un dispositif évolutif
La DGSP prévoit une phase de consolidation : patrouilles pédestres, actions civilo-militaires et campagnes de sensibilisation contre la violence urbaine. L’idée est de transformer la victoire tactique en progrès durable.
Les comités de quartier seront formés à alerter rapidement les forces de l’ordre, tandis que les écoles recevront des modules de prévention afin d’éviter la reconstitution de bandes parmi les plus jeunes.
Vers une paix civile renforcée
Le président Denis Sassou Nguesso a toujours placé la sécurité quotidienne au cœur de son action, rappelle l’essayiste Michel Innocent Peya. La traque des kulunas s’inscrit dans cette vision où stabilité et développement demeurent indissociables.
Dans un contexte régional parfois volatil, sécuriser la capitale envoie également un signal de confiance aux opérateurs économiques et aux partenaires internationaux. La tranquillité publique devient un facteur d’attractivité majeur.
La population, baromètre du succès
Au marché Total, les discussions ne portent plus sur la peur de rentrer tard, mais sur la vitesse des arrestations. « On dort enfin la fenêtre ouverte », sourit un habitant de Makabandilou. Ce ressenti positif reste la meilleure jauge de l’opération.
Les autorités entendent maintenir ce capital de confiance en communiquant régulièrement sur les avancées et en sanctionnant toute dérive individuelle. La sécurité gagnée doit rester compatible avec l’État de droit.
