Brazzaville lance la dynamique
Le centre de conférences du ministère des Affaires sociales a vibré, les 18 et 19 septembre, au rythme d’un atelier qui marque une bascule stratégique pour le Congo-Brazzaville. Soixante acteurs publics et privés ont posé les jalons de la contribution nationale au deuxième Sommet mondial sur le développement social.
Prévu en novembre 2025 à Doha, l’événement international réunira les États sous l’égide des Nations unies. Brazzaville veut y présenter des réponses concrètes aux défis de l’emploi, de l’inclusion et de la protection sociale, trois chantiers que le gouvernement juge essentiels à la stabilité et à la prospérité.
Trois piliers pour une société inclusive
Les discussions ont immédiatement convergé vers l’emploi productif, considéré comme le moteur d’une croissance partagée. Les représentants du patronat ont défendu l’idée d’incitations ciblées afin de dynamiser les entreprises locales et de créer des postes durables, notamment pour les jeunes diplômés souvent cantonnés à l’informel.
Second pilier, l’intégration sociale a mobilisé associations de femmes, organisations de jeunesse et confessions religieuses. Tous ont souligné le besoin d’un maillage territorial plus fin, capable d’amener les services sociaux jusque dans les districts ruraux, afin de réduire les fractures géographiques qui alimentent l’exode vers les grandes villes.
Enfin, la réduction de la pauvreté et la protection sociale, troisième axe, a été examinée à travers la récente expérience du filet social Lisungi. Ses gestionnaires affirment que le ciblage numérique des ménages vulnérables a permis une distribution plus transparente des aides et un suivi statistique renforcé.
Une gouvernance concertée
L’atelier a été co-piloté par plusieurs ministères techniques et le Bureau du Coordonnateur résident des Nations unies, instaurant une méthode de travail horizontale. Cette approche, saluée par les partenaires financiers, doit garantir que chaque engagement futur soit adossé à un responsable clairement identifié.
« La participation du Congo doit mettre en avant ses solutions innovantes issues de son expérience nationale », a rappelé Vincent Sodjinou, représentant de l’OMS Congo, en ouverture. Selon lui, Doha sera l’occasion de montrer que les politiques sociales ne relèvent pas uniquement de transferts monétaires, mais d’investissements productifs.
L’implication du secteur privé a été particulièrement remarquée. Des dirigeants pétroliers aux start-ups numériques, chacun a accepté de fournir des indicateurs et des études d’impact destinés à nourrir la note de position nationale. Le gouvernement y voit un gage de réalisme face aux attentes des bailleurs internationaux.
Une feuille de route 2025-2030
Au terme des deux jours, les participants ont validé une matrice d’engagements couvrant 2025-2030. Ce document, encore confidentiel, fixe des cibles chiffrées pour l’emploi des jeunes, l’extension de la couverture santé universelle et la proportion de population bénéficiant de pensions non contributives.
Il prévoit également des revues annuelles pour ajuster les politiques au regard des données disponibles. L’Institut national de la statistique sera en première ligne pour produire des tableaux de bord trimestriels, tandis qu’un comité interministériel devra arbitrer les besoins budgétaires sans déstabiliser l’équilibre macro-économique.
Pour accompagner cette mise en œuvre, Brazzaville compte sur une hausse progressive de la mobilisation fiscale et sur des partenariats innovants, comme les obligations sociales en monnaie locale. Les experts du Trésor insistent sur la nécessité d’une notation crédible afin d’attirer un vivier d’investisseurs africains.
Ancrer l’agenda social dans la diplomatie
Le ministère des Affaires étrangères est chargé d’intégrer la note de position dans tous les dialogues régionaux, du CEMAC à l’Union africaine. Objectif : parvenir à des convergences qui renforcent la voix de l’Afrique centrale et évitent la dispersion des initiatives lors des négociations à Doha.
Déjà, des discussions informelles ont eu lieu avec le Cameroun et le Gabon sur la reconnaissance mutuelle des protections sociales. Les diplomates congolaise estiment qu’un tel instrument faciliterait la mobilité professionnelle sous-régionale et constituerait une démonstration tangible de solidarité, un principe central du sommet à venir.
Sur le plan multilatéral, Brazzaville mise sur la coopération Sud-Sud. Des équipes techniques seront dépêchées en Amérique latine pour étudier les programmes de transferts conditionnels qui ont réduit la pauvreté extrême. À terme, ces échanges pourraient déboucher sur des projets conjoints financés par des banques de développement émergentes.
Quels bénéfices pour les populations ?
Les associations communautaires, essentielles à la réussite du futur plan, se disent rassurées par la place qu’elles occupent désormais dans la gouvernance. « Nous serons les sentinelles de l’exécution », affirme une coordinatrice de quartier, convaincue que la transparence renforcera la confiance des ménages bénéficiaires.
Pour l’heure, le principal défi demeure la transformation des engagements écrits en actions visibles avant le rendez-vous de 2025. La feuille de route, désormais partagée, offre un cadre. Reste à maintenir l’élan afin que Doha célèbre non pas des promesses, mais des résultats déjà mesurables.