Une nomination symbole du dynamisme congolais
La nomination d’Elwin Gomo au prestigieux SCIDIE Awards 2024 place le Congo-Brazzaville sous le feu des projecteurs africains. Le concours, organisé en novembre à Douala, distingue les entrepreneurs dont l’impact social et l’ingéniosité illustrent la montée en puissance des économies numériques africaines.
Pour de nombreux analystes, cette sélection témoigne d’un écosystème local en maturation, nourri par des initiatives publiques et privées qui encouragent les jeunes talents à se saisir des opportunités offertes par l’innovation technologique et à déployer des solutions adaptées aux réalités nationales et régionales.
Dans les rues de Brazzaville, la nouvelle s’est rapidement répandue. Radios communautaires, blogs spécialisés et comptes influents relaient déjà les appels au vote, preuve qu’un sentiment d’appartenance se consolide autour des réussites entrepreneuriales capables de renforcer la confiance collective dans le futur.
Portrait d’un digital native engagé
Né en 1996, Elwin Gomo appartient à cette génération connectée qui a grandi avec les réseaux sociaux. Diplômé d’une formation certifiée en marketing digital, il développe très tôt un goût prononcé pour la communication interactive et la création de communautés autour de projets innovants.
En 2020, il cofonde Nuxell Technologie, agence spécialisée dans la stratégie de présence en ligne pour petites et moyennes entreprises. L’objectif déclaré consiste à rendre accessibles des outils souvent réservés aux grandes structures, afin d’accélérer la compétitivité des acteurs locaux sur les marchés.
« Voter, c’est soutenir une ambition africaine », écrit-il récemment sur ses réseaux. Cette phrase, devenue virale, synthétise sa démarche : montrer que l’excellence se construit aussi depuis Brazzaville et qu’un parcours modeste peut atteindre la scène internationale grâce à l’effort collectif concerté permanent.
Le numérique, levier de compétitivité nationale
Le Congo-Brazzaville a identifié le numérique comme pilier stratégique de développement. Le Plan national de développement préconise l’extension de la fibre, la formation massive et l’appui aux start-up, convaincu que la transformation digitale conditionne la diversification effective d’une économie longtemps dépendante des ressources extractives.
Dans ce cadre, les profils comme Gomo jouent un rôle de catalyseur. « Ils fournissent des compétences rares tout en créant de l’emploi », observe Julie Mabiala, économiste à l’université Marien-Ngouabi, soulignant la convergence entre aspirations entrepreneuriales et politiques publiques de modernisation du pays.
Les services proposés par Nuxell, qu’il s’agisse de community management ou de publicité ciblée, répondent à la demande croissante des PME cherchant visibilité et clients au-delà des frontières. La digitalisation devient ainsi une passerelle vers l’intégration sous-régionale et vers les chaînes de valeur africaines.
SCIDIE Awards, incubateur panafricain d’excellence
Les SCIDIE Awards, acronyme de Social Change, Innovation, Digital, Impact and Entrepreneurship, ambitionnent depuis cinq ans de valoriser les initiatives africaines transformant durablement leurs communautés. Le jury réunit investisseurs, universitaires et décideurs, conférant à la distinction une crédibilité recherchée par les start-up.
Être finaliste ouvre l’accès à un mentorat continental, à des opportunités de financement et à une visibilité médiatique qui dépasse largement la cérémonie. De précédents lauréats ont levé des capitaux significatifs et signé des partenariats gouvernementaux essentiels à l’industrialisation de leurs innovations.
Pour Gomo, le prix serait autant un accélérateur qu’un label. « Je voudrais prouver que des solutions made in Congo peuvent inspirer Dakar, Kigali ou Le Cap », confie-t-il. Cette dimension transfrontalière correspond à l’esprit d’ouverture que les organisateurs défendent depuis l’origine du programme.
Résonance locale et ambitions continentales
À Brazzaville, plusieurs incubateurs, dont BantuHub et PissieLab, envisagent déjà de diffuser le parcours de Gomo lors de conférences grand public. L’objectif consiste à stimuler la vocation entrepreneuriale et à montrer que la reconnaissance internationale reste accessible sans obligatoirement s’expatrier vers d’autres capitales.
Le secteur privé manifeste également son intérêt. Des banques locales étudient des produits de micro-crédit adaptés aux entrepreneurs du numérique, tandis que des sociétés de télécommunication proposent des forfaits dédiés aux start-up, signe que la dynamique amorcée par quelques pionniers produit un effet d’entraînement.
Pour les économistes, ces évolutions contribuent à la constitution d’une classe moyenne plus résiliente, capable d’investir dans l’éducation, la santé ou l’habitat. Le numérique n’est donc pas qu’un secteur, il irrigue des pans entiers de la société, consolidant le tissu productif national.
Vers un écosystème congolais inclusif et durable
Le gouvernement, par l’intermédiaire du ministère des Postes, des Télécommunications et de l’Économie numérique, multiplie les partenariats pour déployer des centres de formation régionaux. Ces efforts visent à démocratiser l’accès aux métiers technologiques et à réduire la fracture numérique territoriale au Sud.
Dans ce contexte, la réussite potentielle d’Elwin Gomo servirait de cas d’école pour mesurer l’efficacité des politiques d’accompagnement. Son parcours pourrait être documenté, analysé dans les universités et intégré aux programmes scolaires pour susciter l’esprit d’initiative dès le cycle secondaire au Congo.
Quelle que soit l’issue du vote, l’aventure confirme que l’entrepreneuriat congolais gagne en visibilité et en maturité. Les regards sont désormais tournés vers Douala, mais la véritable victoire se joue déjà à Brazzaville, dans les esprits de milliers de jeunes connectés eux-mêmes.