La jeunesse congolaise au cœur du développement
Sous une brise légère venant du fleuve Congo, une poignée de jeunes leaders s’est réunie sur l’allée Charles-Ebina. Leur ambition dépasse la simple rencontre : il s’agit pour la génération montante de façonner un futur commun, en synergie avec les priorités nationales de développement.
Pour ces acteurs associatifs, le Forum international de la jeunesse africaine pour le développement de l’Afrique, plus connu sous l’acronyme Fijada, n’est pas un événement isolé. Il incarne un espace où idées citoyennes et politiques publiques peuvent dialoguer sans posture partisane ni recherche d’effet de manche.
L’engagement affiché rejoint l’esprit de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, feuille de route continentale que les autorités congolaises ont régulièrement inscrite dans leurs discours de planification. La jeunesse locale entend désormais transformer ces slogans prospectifs en actions tangibles, mesurables et compatibles avec les réalités de terrain.
Le Forum Fijada, genèse et objectifs
Fondé en 2022 à Kinshasa par Jonathan Lumbeya Masuta, le Fijada se veut une plateforme inter-pays consacrée à la participation des jeunes aux Objectifs de développement durable. Son modèle repose sur trois piliers : mentorat, plaidoyer et incubation de projets axés sur l’économie verte.
Selon son président, « nous devons cesser de parler de potentiel et passer à l’exploitation responsable de notre créativité ». Cette formule, prononcée lors de la table-ronde du 12 août 2025 à Kinshasa, continue de résonner de part et d’autre du majestueux fleuve.
Kinshasa 2025, Brazzaville 2026 : fil rouge durable
La rencontre brazzavilloise avait pour but essentiel de diffuser les recommandations issues de Kinshasa. Le document stratégique insiste notamment sur l’éducation environnementale dès le primaire, l’accès élargi aux technologies propres et la création d’un fonds panafricain pour soutenir les start-up à fort impact écologique.
Installé comme nouveau représentant du mouvement en République du Congo, Daniel Biangoud s’est engagé à « porter cette feuille de route dans chaque arrondissement, en lien permanent avec les administrations locales ». L’ancien député José Cyr Ebina a salué cette nomination, y voyant un « pont générationnel nécessaire ».
Jonathan Masuta, pour sa part, souhaite que la prochaine table-ronde se tienne à Brazzaville en 2026. Un tel choix renforcerait la diplomatie de proximité entre les deux capitales les plus proches au monde et inciterait à une approche transfrontalière de la gouvernance environnementale du bassin du Congo.
Entrepreneuriat écologique, un champ d’opportunités
Au-delà des discours, le Fijada propose un accompagnement concret. Parmi les projets pilotes cités figurent des unités de recyclage de plastiques, des jardins maraîchers urbains alimentés à l’énergie solaire et des applications mobiles capables de cartographier les décharges informelles pour orienter les collectes communautaires.
Les partenaires financiers, essentiellement des banques régionales et des entreprises extractives soucieuses de leur responsabilité sociétale, envisagent de s’associer. La perspective d’un marché d’emplois verts estimé à plusieurs milliers de postes d’ici cinq ans suscite un intérêt croissant parmi les jeunes diplômés brazzavillois.
Mobiliser les savoirs traditionnels
Au cours des échanges, plusieurs intervenants ont rappelé que la durabilité ne se limite pas aux outils numériques. Les pratiques agro-forestières ancestrales, la pharmacopée traditionnelle et les rites de conservation des sols constituent un patrimoine précieux que la jeunesse souhaite réhabiliter et intégrer aux curricula de formation.
Pour la sociologue Nelly Mabiala, « associer nos anciens à la recherche de solutions rendra chaque projet plus légitime ». Cette méthode d’inclusion intergénérationnelle, déjà encouragée par les services du ministère de la Jeunesse, pourrait servir de modèle à d’autres initiatives régionales.
Vers une citoyenneté africaine en mouvement
L’obstacle récurrent de la mobilité intra-africaine a été longuement débattu. L’accès aux visas demeure complexe pour les jeunes entrepreneurs et chercheurs, malgré les efforts de l’Union africaine. Des propositions d’un passeport régional pilote couvrant la Communauté économique des États de l’Afrique centrale ont émergé.
Pour Jonathan Masuta, la différence entre diplomatie et coopération doit être clarifiée : « la diplomatie relève des États, la coopération relève de nous tous ». Cet éclairage vise à responsabiliser les associations qui, selon lui, peuvent créer des réseaux d’échanges avant même toute réforme réglementaire.
Un partenariat public-privé en gestation
Le ministère congolais en charge de l’Environnement a manifesté son intérêt pour les conclusions du Fijada. Des discussions exploratoires seraient en cours afin d’intégrer certaines recommandations dans la révision prochaine du Plan national de développement et dans le programme de modernisation des marchés urbains.
Si ces synergies se concrétisent, Brazzaville pourrait devenir un laboratoire d’initiatives vertes associant pouvoirs publics, secteur privé et société civile. Pour le sociologue Elie Ndinga, « cette triangulation garantira une meilleure appropriation par les citoyens et renforcera la cohérence des politiques environnementales nationales ».
Une feuille de route conjointe devrait être dévoilée avant la fin de l’année, à l’occasion de la prochaine Foire internationale de Brazzaville. Les organisateurs espèrent y présenter les premiers prototypes issus des sessions de mentorat, preuve que les engagements pris ne resteront pas lettre morte.