Un cadre légal tourné vers la durabilité
Adopté en 2020, le nouveau code forestier de la République du Congo fixe des règles exigeantes pour une gestion inclusive et durable des espaces boisés. Les décrets d’application, encore en chantier, doivent préciser les modalités d’implication des communautés et les mécanismes de partage d’avantages.
La notion de forêt communautaire y occupe une place stratégique. Le texte consacre le droit des populations locales à gérer, de manière encadrée, certains massifs afin de concilier protection des écosystèmes et amélioration du niveau de vie rural.
La société civile en première ligne
Soucieuses d’accompagner ce processus, plusieurs organisations congolaises ont uni leurs forces. Le Réseau femmes africaines pour le développement durable, la Plateforme pour la gestion durable des forêts et l’Observatoire congolais des droits de l’homme ont convié, à Brazzaville, une vingtaine d’acteurs associatifs à trois jours d’échanges.
L’atelier s’est tenu du 3 au 5 décembre 2025 sous la houlette de Marie Julienne Longo Bendo. « Notre ambition est d’alimenter les textes avec des propositions concrètes et réalistes », a résumé la coordonnatrice nationale du Refadd à l’ouverture des travaux.
L’appui constant des partenaires techniques
Le bureau d’études Terea, mandaté pour rédiger les premiers drafts règlementaires, a soumis ses documents aux participantes. Ces dernières ont passé au crible chaque article pour déceler les points faibles et formuler des recommandations, soutenues par l’expertise juridique d’Alfred Nkodia, coordonnateur de la P.g.d.f.
Selon lui, « une relecture critique par le terrain permet d’éviter des imprécisions susceptibles de freiner la mise en route des projets communautaires ».
La dimension genre comme fil conducteur
Au cœur des débats, la question du genre a fait consensus. « Cette implication démontre la responsabilité de la femme dans la gouvernance forestière », a insisté Mme Longo Bendo. Les participantes entendent inscrire l’égalité dans chaque dispositif, depuis la composition des comités locaux jusqu’au partage des revenus.
Les organisations présentes rappellent que les femmes assurent la majorité des activités de collecte et de transformation forestières. Leur expertise empirique constitue un atout précieux pour protéger la biodiversité tout en diversifiant les sources de revenus familiaux.
Entreprenariat vert et autonomisation
La possibilité d’établir des micro-entreprises féminines autour des produits forestiers non ligneux, du tourisme écologique ou de la valorisation des essences médicinales a été largement évoquée. Les participantes plaident pour des quotas de formations techniques et de financements dédiés afin d’amorcer ces initiatives.
Convaincue par l’exemple de certaines coopératives rurales, Nina Cynthia Kiyindou Yombo, directrice exécutive de l’Ocdh, souligne que « l’entreprenariat vert constitue un levier double, social et écologique ».
Un comité national de suivi en gestation
Parmi les projets de décrets examinés figure la création d’un Comité national de suivi et d’évaluation de l’accès aux ressources génétiques forestières. Cet organe assurera la transparence du partage des avantages liés à l’exploitation raisonnée des forêts communautaires.
Les participantes recommandent que la parité y soit consacrée et que des représentants des populations autochtones y siègent, afin de garantir une prise de décision inclusive et informée par les réalités locales.
Le rappel des enjeux socio-écologiques
Invité à contextualiser les discussions, Maixent Fortunin Agnimbat Emeka, président du Forum pour la gouvernance des droits de l’homme, a rappelé la triple fonction des forêts communautaires : économique, sociale et écologique.
Face à une pauvreté rurale persistante, il juge « nécessaire de déléguer certains pouvoirs de gestion aux habitants, dans un cadre juridique solide, pour que la forêt devienne moteur de développement et rempart contre la dégradation environnementale ».
Des défis transformés en opportunités
Les organisations saluent la volonté gouvernementale de consolider les droits communautaires, tout en reconnaissant l’ampleur des défis : clarification des limites, encadrement des coupes, accès au crédit et formation des gestionnaires. L’inclusion des femmes apparaît comme un accélérateur de solutions pratiques et durables.
Les participantes estiment que la synergie entre État, société civile et secteur privé créera un environnement propice à l’innovation locale, condition d’un succès pérenne.
Vers un texte final consensuel
À l’issue des trois jours, un document de recommandations a été validé. Il sera transmis au groupe de travail multi-acteurs chargé de finaliser les décrets avant leur adoption officielle. Les propositions portent sur la gouvernance, la fiscalité incitative, les mécanismes de règlement des litiges et le renforcement des capacités.
« Un cadre clair et participatif favorise des résultats probants », rappelle Mme Longo Bendo, confiante quant à l’intégration prochaine des suggestions dans la version finale.
Perspectives concertées
D’autres ateliers sont envisagés en 2026, notamment dans les départements du Niari et de la Sangha, afin de recueillir le point de vue des communautés forestières elles-mêmes. Ce calendrier traduit l’engagement continu des autorités à ancrer la réforme dans la réalité du terrain.
En plaçant la voix des femmes au centre de l’écriture des règles, le Congo-Brazzaville inscrit la gestion durable de ses forêts dans une dynamique d’inclusion et de progrès, fidèle à l’esprit de son code forestier moderne.
