Le tournant énergétique au cœur de la diversification congolaise
Pointe-Noire, carrefour historique de l’industrie pétrolière d’Afrique centrale, vient de prêter ses murs à un exercice inédit : réfléchir à l’après-or noir sans renoncer aux ambitions de croissance nationale. Organisées par la Rencontre pour la paix et les droits de l’homme (RPDH) avec l’appui financier de Rockefeller Philanthropy Advisors et le soutien technique d’Energy Transition Fund, les assises consultatives des 26 et 27 juin ont placé la transition énergétique au centre du débat public. Dans un contexte où les indicateurs macro-économiques demeurent étroitement corrélés aux recettes pétrolières, le choix de questionner ce modèle résonne comme une nécessité plus que comme une option stratégique.
Une table ronde plurielle pour baliser l’après-pétrole
Sous la modération du Dr Jean Chrios Moukala, la conférence a réuni élus locaux, techniciens des ministères sectoriels, représentants communautaires et chercheurs, instaurant une rare polyphonie institutionnelle. L’objectif affiché consistait à poser les jalons d’une feuille de route partagée, susceptible d’inscrire durablement le Congo dans l’orbite des économies sobres en carbone. « Nous sortons de ces échanges avec un canevas qui, s’il trouve un appui politique résolu, peut devenir un référentiel opérationnel », a souligné Christian Mounzéo, coordonnateur de la RPDH. La méthode, inspirée des cercles de concertation internationale, privilégie la co-construction pour renforcer l’appropriation locale des politiques publiques.
Des propositions axées sur l’hydroélectricité et le savoir local
Parmi les options techniques discutées, l’exploitation raisonnée du potentiel hydrographique national a fait l’unanimité. « Le pays est densément irrigué ; l’hydroélectricité représente un levier naturel vers une énergie renouvelable compétitive », a rappelé Akoua Maryse de la direction départementale de l’Énergie hydraulique. Les intervenants ont également souligné la nécessité de valoriser le biogaz agricole, d’inciter à l’implantation de mini-réseaux solaires ruraux et de stimuler la recherche endogène. L’idée force demeure la mise en synergie de solutions de proximité afin d’éviter la dépendance exclusive à des savoir-faire exogènes coûteux.
Renforcer la gouvernance et les capacités pour concrétiser la vision
Si le diagnostic technique paraît clair, sa traduction en politiques effectives suppose des prérequis institutionnels. Les participants ont pointé l’impératif d’un accès élargi à l’information énergétique, la consolidation des capacités administratives et l’ancrage d’une culture d’évaluation continue des projets. « Engager la volonté politique et fiabiliser les mécanismes de suivi-évaluation sont les conditions sine qua non d’une mise en œuvre crédible », a insisté Christian Mounzéo. À cet égard, la récente création d’une cellule interministérielle sur la transition énergétique ouvre une fenêtre de coordination qui reste à consolider.
Vers une adhésion stratégique aux alliances internationales
Au-delà des frontières nationales, la RPDH milite pour l’adhésion du Congo à l’initiative « Beyond Oil and Gas Alliance », réseau de pays engagés dans la sortie progressive des combustibles fossiles. Cette ouverture diplomatique serait l’occasion de capter des financements climat, d’accéder à des dispositifs de transfert technologique et de gagner en visibilité sur la scène internationale. Elle n’exclut pas, dans l’immédiat, l’utilisation pragmatique des ressources pétrolières pour financer la transition, mais inscrit l’économie congolaise dans une trajectoire de neutralité carbone à moyen terme. En conjuguant mobilisation citoyenne, volontarisme étatique et partenariats mondiaux, le Congo-Brazzaville pourrait ainsi transformer un débat prospectif en avantage comparatif tangible.