Un bureau renouvelé pour un secteur stratégique
La séance élective tenue le 19 août à Brazzaville a confirmé le renouvellement du bureau du Conseil supérieur de la liberté de communication, pivot institutionnel de la gouvernance médiatique congolaise. Par consensus, Jean Obambi et Jérôme-Patrick Mavoungou rejoignent l’équipe dirigeante aux côtés du président Médard Milandou Nsonga.
Le vote a réuni hauts conseillers et délégués des rédactions publiques comme privées, tous favorables à une feuille de route orientée vers la consolidation du pluralisme. L’unanimité observée traduit un désir collectif de stabilité institutionnelle, préalable jugé indispensable à une modernisation durable de l’écosystème médiatique.
Fraîchement investi vice-président, Jean Obambi, ancien rédacteur en chef, promet d’articuler expérience de terrain et exigences réglementaires. Pour sa part, Jérôme-Patrick Mavoungou assume la fonction de secrétaire comptable, enjeu clef pour la transparence budgétaire souvent réclamée par les organisations professionnelles.
Enjeux sociopolitiques de la régulation médiatique
Créé en 2001, le CSLC occupe une position charnière entre pouvoirs publics, professionnels de l’information et citoyens. Sa mission première consiste à garantir un accès équitable aux antennes, ainsi qu’à protéger journalistes et animateurs des pressions susceptibles d’entraver l’exercice de leur métier.
Cette fonction régulatrice s’inscrit dans une perspective sociologique de cohésion. Lorsque les médias pratiquent une concurrence loyale, ils deviennent vecteurs de débat constructif et factors d’intégration symbolique. À l’inverse, la concentration excessive peut générer méfiance et polarisation, deux risques que l’organe entend contenir.
Le politologue Armand Bissila rappelle que « la crédibilité d’un système médiatique repose sur l’équilibre entre contrôle institutionnel et auto-régulation ». Le consensus enregistré autour du nouveau bureau constitue, selon lui, « un signal de maturité » susceptible de renforcer la confiance du public.
Garantir le pluralisme à l’ère du numérique
Avec l’explosion des plateformes en ligne, la mission du CSLC se complexifie. Il ne s’agit plus seulement de surveiller fréquences hertziennes, mais d’assurer l’équité algorithmique sur les réseaux sociaux. Les commissaires préparent ainsi un guide de bonnes pratiques dédié aux rédactions digitales émergentes.
Dans cette optique, des ateliers thématiques seront organisés en partenariat avec l’université Marien-Ngouabi. Ils aborderont la modération des commentaires, la lutte contre la désinformation et la formation continue des community managers, afin d’adapter les normes de déontologie au rythme de circulation accéléré des contenus.
Les télévisions, quant à elles, devront accroître la part de production nationale à l’antenne. Les textes fixent un minimum de 40 %, objectif que plusieurs chaînes privées ont déjà dépassé. Le régulateur promet un accompagnement technique pour encourager les studios indépendants à franchir ce seuil.
Professionnalisation et défis économiques des rédactions
La viabilité financière demeure l’angle mort de nombreuses entreprises de presse. Les coûts de diffusion, la faiblesse du marché publicitaire et la concurrence des contenus gratuits fragilisent les équipes. Le CSLC entend favoriser un dialogue entre banquiers et éditeurs pour identifier des mécanismes de soutien innovants.
Parmi les pistes évoquées figure la création d’un fonds d’appui alimenté par une taxe minime sur la publicité internationale. Inspirée d’expériences africaines similaires, la proposition pourrait alléger la dépendance des rédactions à l’égard des annonceurs et stimuler l’investissement dans les formats d’investigation.
Le sociologue Marie-Claude Kongo souligne que « la durabilité économique conditionne l’indépendance éditoriale, donc la qualité de l’information ». L’engagement affiché du conseil à accompagner la gestion comptable illustre, selon elle, une prise de conscience des liens structurels entre économies médiatiques et vitalité démocratique.
Perspectives : vers une confiance renforcée
Dès la semaine prochaine, le nouveau bureau rencontrera les organisations de journalistes afin de recueillir leurs priorités. L’agenda inclut l’actualisation du code de bonne conduite et la désignation d’observateurs régionaux chargés de signaler rapidement tout manquement à l’éthique professionnelle.
Parallèlement, une campagne de sensibilisation grand public sera déployée sur les ondes locales pour rappeler les droits des auditeurs à une information fiable. Cette initiative, soutenue par le ministère de la Communication, vise à encourager la dénonciation des discours haineux et à promouvoir le fact-checking.
Les représentants des radios communautaires ont salué la démarche. « Un cadre clair offre visibilité et sérénité à nos bénévoles », explique Rosalie Tamia, coordinatrice à Pointe-Noire. Selon elle, l’accompagnement technique promis permettra de renforcer le traitement des sujets de proximité en langues locales.
À moyen terme, le CSLC envisage l’ouverture d’un portail interactif où citoyens, universitaires et journalistes pourront suivre les indicateurs de pluralisme, déposer des réclamations et accéder aux décisions motivées du régulateur. Cette démarche de transparence recoupe l’objectif gouvernemental de numérisation des services publics.
En s’appuyant sur une équipe dirigeante élargie, la régulation congolaise des médias entame donc une nouvelle phase, articulant pluralisme, professionnalisation et innovation. L’élan de consensus autour du bureau constitue un socle favorable au renforcement du lien de confiance entre journalistes et citoyens.