Un élan de solidarité inédit à Brazzaville
Sous le ciel chaud de décembre, la cour d’un centre communautaire de Poto-Poto a résonné de rires d’enfants. Ce 15 décembre, l’association Enfants à venir de demain, plus connue sous l’acronyme EAD, a dévoilé un programme de parrainage destiné aux orphelins du VIH.
Un contrat moral avec chaque parrain
La présidente Mireille Amona a expliqué que toute personne, au Congo ou dans la diaspora, peut désormais accompagner un enfant durant un an, plusieurs années ou toute une vie. « Nous officialisons la relation par un engagement écrit adapté aux moyens de chacun », a-t-elle précisé devant une assistance attentive.
Trois axes : éducation, santé, accompagnement social
Le dispositif couvre la scolarité, la prise en charge médicale et une veille psychosociale permanente. Les besoins individuels, recensés avec l’aide des équipes pédiatriques du Centre hospitalier universitaire de Brazzaville, orientent les contributions. « Nous voulons que chaque franc se traduise par un progrès mesurable », insiste Mme Amona.
Réponse locale à la baisse des financements internationaux
Depuis plusieurs années, les appuis extérieurs consacrés au VIH diminuent. Pour la responsable de l’association, « la communauté nationale doit prendre le relais ». Elle appelle donc entreprises, fonctionnaires et citoyens à s’unir autour d’un « pacte solidaire » permettant d’ancrer durablement la réponse dans le tissu congolais.
Un soutien institutionnel salué
La présidente de l’EAD a remercié l’épouse du chef de l’État, Antoinette Sassou-N’Guesso, pour « son engagement constant en faveur des enfants affectés ». Les représentants du ministère de la Santé ont, eux, souligné que ce type d’initiative renforce la stratégie nationale d’éradication des nouvelles infections pédiatriques au VIH.
Focus sur les orphelins les plus vulnérables
Le programme cible prioritairement des enfants suivis en pédiatrie au CHU, au Centre de traitement ambulatoire et dans plusieurs structures partenaires du Programme national de lutte contre le sida. Beaucoup vivent chez des tantes ou grands-parents dont les revenus ne couvrent parfois pas leurs propres besoins essentiels.
Des jouets pour un Noël avant l’heure
En marge de l’annonce, soixante enfants ont reçu tablettes, jeux vidéo portables, poupées, ballons et voitures téléguidées. L’étincelle dans leurs yeux suffisait à mesurer l’impact. « Je rêvais d’une tablette, je l’ai eue ! », s’est exclamé Yves, seize ans, encore stupéfait par la surprise.
La joie, antidote aux discriminations
Ces instants de fête combattent le poids psychologique lié à la maladie et à la stigmatisation. Les psychologues partenaires rappellent qu’un cadeau, aussi symbolique soit-il, peut améliorer l’estime de soi et favoriser l’adhésion au traitement, élément clé du suivi médical des adolescents vivant avec le VIH.
Engager la diaspora congolaise
EAD mise sur la fibre patriotique des Congolais de l’étranger. Plusieurs influenceurs basés à Paris, Montréal et Abidjan ont déjà relayé la campagne sur les réseaux sociaux. Les premiers parrainages internationaux arrivent, preuve que la solidarité n’a pas de frontières, mais se nourrit d’histoires partagées.
Digitalisation du lien parrain-filleul
Le site internet de l’association offre un espace sécurisé où le parrain suit les progrès scolaires et sanitaires de son filleul. Rapports trimestriels, photos, messages vocaux : la transparence nourrit la confiance et fidélise les donateurs, souligne l’équipe d’EAD, forte d’une dizaine de bénévoles aux compétences numériques.
Complémentarité avec les structures publiques
Les responsables du Programme national de lutte contre le sida voient dans ce partenariat une occasion de rapprocher les services sociaux des besoins réels. « Nous partageons nos bases de données pour éviter les doublons et optimiser les ressources », confie un cadre du PNLS, convaincu de l’utilité d’une telle synergie.
Des chiffres qui interrogent
Selon les données officielles, près de 7 000 enfants vivraient avec le VIH en République du Congo. Un tiers serait orphelin d’au moins un parent. Pour Mireille Amona, « ces statistiques doivent cesser d’être abstraites ». Chaque parrainage transforme un tableau Excel en une histoire humaine, martèle-t-elle.
EAD, sept ans de lutte contre la triple peine
Fondée en 2017 et lancée officiellement en 2023, l’association a d’abord accompagné des enfants drépanocytaires, puis des jeunes en situation de handicap. Sa vocation : combattre la triple peine que sont l’orphelinat, la précarité et la maladie. Le VIH s’est imposé comme nouvelle priorité en observant les besoins du terrain.
Un modèle reproductible dans les départements
Les coordinations sanitaires de Pointe-Noire, Ouesso et Dolisie ont manifesté leur intérêt. L’idée est d’adapter le dispositif, avec des parrains locaux, aux réalités de chaque département. « La méthode est prête, il suffit d’une volonté collective », assure un médecin public, prêt à piloter le projet dans le Kouilou.
La place centrale des femmes leaders
Le conseil d’administration de l’EAD compte six femmes sur neuf membres. « Nous connaissons les défis de la maternité, de la santé et du budget familial ; cela nous rend sensibles au sort de ces enfants », relate la trésorière. Cette gouvernance féminine imprime un style attentif et inclusif.
Soutien privé et fiscalité incitative
Plusieurs sociétés pétrolières et banques locales ont manifesté leur intérêt. Les dons réalisés dans le cadre du parrainage bénéficient d’un abattement fiscal, mesure prévue par la loi de finances pour encourager la responsabilité sociale des entreprises. Les premières conventions devraient être signées au premier trimestre 2026.
Un horizon d’espoir durable
À la tombée de la nuit, les enfants regagnent leurs foyers un jouet sous le bras, un autre trésor dans le cœur : la certitude de n’être plus seuls. « Ensemble, nous pouvons bâtir l’avenir de ces jeunes Congolais », conclut Mireille Amona, déterminée à transformer la générosité en droit fondamental.
