Mossendjo, nouvelle scène poétique émergente
In the savannah-lined chef-lieu du Niari, la ville de Mossendjo a vécu début août une parenthèse artistique singulière : la finale du concours « Poésie pour Mossendjo », première édition couronnée par la victoire de Jean-Didier Magnangani.
L’évènement, accueilli dans la salle de mariage de l’Hôtel de ville, a réuni autorités municipales, sages locaux et invités venus saluer des plumes prometteuses, confirmant l’attrait croissant pour la création littéraire dans le sud-ouest congolais.
Une initiative associative portée par la jeunesse
Le coordinateur du G7 Mossendjo, l’écrivain et enseignant Bexelant Cyr Emland Moassa Ibhenguet, voyait dans ce concours « une modeste contribution à l’expression culturelle locale » plutôt qu’un magistère littéraire imposé aux aînés.
Ses mots, applaudis par les participants, traduisent l’ambition d’un territoire longtemps perçu comme périphérique : faire entendre ses voix, composer son propre récit et, ce faisant, participer au rayonnement culturel national souhaité par les pouvoirs publics.
Déposées entre juin et juillet, 118 œuvres venues de Mossendjo, de Pointe-Noire, de Brazzaville et de la diaspora ont afflué vers le jury, signe d’un réseau diasporique attentif à ce qui se joue au pays.
Un jury exigeant pour valoriser la qualité littéraire
Derrière la figure de Magnangani, quatre finalistes ont été distingués : Samangel Boukongou, Alain Yves Boussala, Édouard Bibinda et Céleste Exaucé Sindoussoulou, chacun salué pour sa virtuosité et son engagement thématique.
Le jury, composé d’enseignants de lettres et d’artistes confirmés, évaluait style, musicalité, originalité, mais aussi sensibilité sociale, afin de retenir des textes capables de dialoguer avec le vécu quotidien des habitants de Mossendjo.
Des récompenses qui stimulent la création locale
Magnangani, lauréat, repart avec un recueil offert, un dictionnaire de poche, une enveloppe de cent mille francs CFA, mais surtout l’accompagnement éditorial du G7 pour publier son premier opus, horizon que de nombreux jeunes auteurs congolais peinent à atteindre.
Les dotations monétaires, de soixante-quinze mille à dix mille francs pour les autres lauréats, restent symboliques, mais elles rappellent que la littérature est aussi un travail méritant reconnaissance matérielle.
Derrière les chiffres, la démarche associative interroge la place de la création littéraire dans l’économie locale : librairies rares, débouchés éditoriaux limités, pouvoir d’achat contraint, autant de facteurs que G7 Mossendjo entend contourner par l’entraide.
Un ancrage social au cœur du Niari
René Paka, vice-président du Conseil municipal, représentant le maire, a salué « un élan qui renforce la vitalité culturelle prônée par les autorités », avant de promettre une collaboration accrue pour l’édition 2026.
Cet ancrage institutionnel résonne avec la volonté étatique de promouvoir les industries culturelles créatives, secteur mentionné dans plusieurs plans de développement, comme relais de diversification économique et de cohésion sociale.
Mossendjo, carrefour ferroviaire entre le Gabon et l’Atlantique, connaît une dynamique démographique alimentée par l’exploitation forestière et minière ; la tenue d’événements culturels participe dès lors à équilibrer une identité souvent réduite aux ressources naturelles.
Les textes primés, selon des extraits lus lors de la cérémonie, explorent la nostalgie des routes de latérite, l’odeur du bois d’okoumé, le souvenir des bals populaires ou encore le rêve d’une ville plus verte et solidaire.
Cette matière poétique, ancrée dans le terroir, rejoint des thématiques universelles : mobilité, environnement, mémoire. Elle offre un miroir subtil aux enjeux contemporains auxquels les pouvoirs publics répondent par des politiques d’aménagement et de préservation.
Perspectives pour l’édition 2026
D’un point de vue sociologique, le concours constitue un espace liminal où se négocient statuts et identités : jeunes, diaspora, autorités et anciens échangent sur un pied d’égalité autour de l’esthétique, loin des hiérarchies habituelles.
Pour les organisateurs, l’enjeu prochain sera de consolider le modèle économique : mobiliser mécènes locaux, partenariats institutionnels et plateformes numériques capables de diffuser les textes au-delà de l’évènement.
La date de juin 2026 est déjà inscrite dans les agendas. Le G7 Mossendjo projette des ateliers d’écriture en milieu scolaire, reflets d’une approche inclusive visant à détecter les talents très tôt et à démocratiser l’accès à la lecture.
Financement durable des initiatives culturelles
Les organisateurs envisagent de créer un fonds participatif, nourri par des résidents et par la diaspora, afin de sécuriser l’impression des recueils et la tenue des ateliers, sans dépendre exclusivement de subventions publiques occasionnelles ailleurs.
Plusieurs entreprises forestières locales ont déjà indiqué leur intérêt, y voyant un moyen d’inscrire leur responsabilité sociétale dans la durée, tout en renforçant l’image positive du Plateau des Cataractes auprès des investisseurs et touristes potentiels.
À terme, le G7 souhaite développer une résidence d’écrivains à Mossendjo, ouverte aux créateurs du bassin du Congo, offrant logement, bourse et espace de recherche, ce qui placerait la ville sur la carte culturelle régionale.
La poésie, vecteur de cohésion et de rayonnement
Dans un pays où la population est majoritairement jeune, la poésie, forme concise et orale, se révèle un vecteur efficace de transmission, rejoignant les traditions du conte et du chant, tout en s’adaptant aux réseaux sociaux.
À Mossendjo comme ailleurs, l’effervescence littéraire témoigne d’une société en mouvement qui, tout en accueillant les ambitions industrielles, revendique sa dimension sensible ; elle articule ainsi culture et développement harmonisé prôné par l’agenda national.