Les prémices d’une candidature inattendue
Le samedi 16 août, Alexis Bongo a placé le centre culturel Zola sous le feu des projecteurs en annonçant sa candidature à la présidentielle de mars 2026. La scène, sobre, a réuni journalistes, universitaires et curieux venus entendre la voix derrière l’émission télévisée Homéosthasie.
Cette déclaration marque le retour dans l’arène d’un visage familier du paysage médiatique congolais, neuf ans après un premier essai resté inabouti. Le journaliste avance cette fois avec la ferme promesse de mener sa démarche « jusqu’au bout », loin du simple symbole.
De l’écran au terrain politique
Agé de 56 ans, Alexis Bongo appartient à cette génération de communicateurs dont la notoriété s’est construite sur un ton pédagogique et une proximité assumée avec le public. Ses chroniques sur la cohésion sociale lui ont valu l’étiquette de panafricaniste modéré.
Passer de la caméra aux urnes n’est pourtant pas anodin. Au Congo, l’accès au pouvoir reste régi par des structures institutionnelles robustes qui imposent à chaque prétendant rigueur, clarté programmatique et respect des règles fixées par la Constitution révisée en 2015.
Un programme baptisé « Congo nouveau »
Au cœur de son projet, le concept de « Congo nouveau » ambitionne de renforcer la gouvernance participative, de doper la diversification économique et de soutenir les secteurs porteurs comme l’agro-industrie et le numérique. Le slogan vise également un modèle redistributif solidaire qui séduit une partie de la jeunesse connectée.
Le candidat met également en avant la création d’un fonds souverain dédié à la montée en compétence des collectivités locales. Selon lui, une déconcentration budgétaire raisonnée favoriserait l’émergence d’initiatives citoyennes alignées sur les objectifs du Plan national de développement 2022-2026 et de santé.
La place stratégique de la jeunesse
Face aux caméras, Alexis Bongo parle d’une « génération éveillée » qu’il entend associer à chaque étape de son itinéraire. Il propose d’installer, dans les quinze départements, des ateliers permanents où les jeunes discuteraient des politiques publiques et évalueraient leur impact réel.
Cette approche participative résonne avec la stratégie gouvernementale actuelle qui encourage la formation et l’emploi des jeunes dans les filières vertes, numériques et culturelles. Sur le terrain, nombre d’ONG saluent un discours complémentaire aux initiatives déjà conduites par les pouvoirs publics.
Cadre électoral et exigences légales
Le dépôt officiel des dossiers interviendra début janvier 2026 devant la Cour constitutionnelle. Chaque aspirant devra notamment présenter un casier judiciaire vierge, une caution de 25 millions FCFA, 10 000 signatures de soutien issues des quatre départements les plus peuplés, ainsi qu’un certificat médical d’aptitude.
Alexis Bongo affirme disposer d’un réseau citoyen capable de relever ce défi administratif. « Le peuple est plus riche que la caution », répète-t-il, s’appuyant sur des collectes communautaires qui, selon son équipe, auraient déjà franchi la barre des 18 millions.
Outre ces exigences, la Cour constitutionnelle prévoit d’inviter des missions d’observation de l’Union africaine et de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale. L’objectif affiché est de garantir la transparence du comptage électronique des voix, récemment testé lors des législatives partielles de 2023.
Réactions du paysage politique
Dans les rangs de la majorité présidentielle, on accueille la nouvelle avec assurance, rappelant que la compétition libre constitue un pilier de la démocratie congolaise. « La pluralité des voix renforce la légitimité du scrutin », souligne un cadre du Parti congolais du travail.
Du côté de l’opposition, certains saluent « la vitalité du débat », tandis que d’autres doutent de la capacité d’un novice à mobiliser durablement. Le politologue Théophile Mabiala estime toutefois que « toute candidature issue de la société civile offre un baromètre utile des attentes sociales ».
Enjeux sociétaux d’une échéance cruciale
Au-delà des profils, la présidentielle de 2026 s’inscrit dans un contexte régional marqué par la quête de stabilité et la montée des défis climatiques. Le Congo, engagé dans des projets structurants avec ses partenaires, vise à consolider son attractivité et son rôle diplomatique.
Les électeurs interrogeront donc les candidats sur la modernisation des infrastructures, la maîtrise de la dette et la transition énergétique. Sur ces points, Alexis Bongo assure vouloir travailler de concert avec les institutions existantes, privilégiant une approche graduelle plutôt qu’une rupture brutale.
Pour nombre d’observateurs, la campagne qui s’ouvre sera également un test de maturité pour les réseaux sociaux, désormais jugés déterminants dans la formation de l’opinion publique. Le Conseil supérieur de la liberté de communication promet une vigilance accrue contre la désinformation.
En attendant l’ouverture officielle de la campagne, les équipes affûtent leurs argumentaires et quadrillent les réseaux communautaires. Brazzaville bruisse déjà de débats sur l’équilibre entre continuité et renouvellement, signe qu’une élection peut être compétitive tout en respectant les institutions établies.
À sept mois du dépôt des parrainages, l’entrée en lice d’Alexis Bongo rappelle que le pluralisme reste vivant au Congo. Reste à voir si le journaliste convertira sa popularité audiovisuelle en capital politique suffisant pour s’installer durablement dans la compétition, et pacifique.