Calendrier électoral et modernisation
Le compte à rebours vers la présidentielle de mars 2026 est lancé dans la République du Congo. Du côté des institutions, la Commission nationale électorale indépendante, créée en 2023, peaufine le calendrier opérationnel, tandis que le ministère de l’Administration du territoire évoque déjà un scrutin « moderne et inclusif ».
Cette volonté de modernisation n’exclut pas les préoccupations exprimées par diverses voix politiques. Vendredi 5 septembre 2025, à Brazzaville, la plateforme Rassemblement des forces du changement a présenté une série de propositions pour garantir, selon elle, « transparence et équité » lors de la prochaine consultation populaire.
Les revendications du R.f.c
Sous la voix de Marcel Guitoukoulou, président du Congrès du peuple, l’opposition réunie au sein du R.f.c affirme vouloir faire de 2026 « un tournant ». Les dirigeants de six partis signataires plaident pour une refonte intégrale du fichier électoral et l’introduction d’un dispositif biométrique présenté comme incontournable.
Selon la plateforme, l’actuel recensement ne reflète pas fidèlement le corps électoral. Des doublons, des radiations intempestives et des inscriptions omises hanteraient, à leurs yeux, les listes. La biométrie, poursuivent-ils, permettrait d’associer chaque citoyen à une empreinte unique, réduisant ainsi toute marge de contestation post-vote.
Le R.f.c insiste également sur la nécessité d’un « dialogue inclusif » associant partis, société civile, organisations confessionnelles et diaspora. Pour ces responsables, seule une concertation préalable autour des règles du jeu peut éviter les crispations. Ils se disent prêts à « contribuer sans exclusive » à un climat apaisé.
Le débat sur le fichier électoral biométrique
Côté gouvernemental, on rappelle que le fichier électoral a déjà été audité en 2024 par un cabinet africain indépendant, dont les conclusions ont validé « un taux de fiabilité supérieur à 95 % ». L’option biométrique, affirme un conseiller joint par téléphone, « demeure sur la table, selon des impératifs budgétaires ».
Les autorités rappellent aussi que l’inscription biométrique mobilise des infrastructures spécifiques, depuis des stations d’enrôlement jusqu’aux serveurs hébergeant les données cryptées. Le Parlement vient d’adopter un collectif budgétaire pour financer, en priorité, les écoles et la santé. Un arbitrage devra donc concilier impératifs sociaux et demandes technologiques.
Dans ce contexte, l’idée d’un recensement administratif spécial, proposée par l’opposition, retient l’attention de plusieurs observateurs. L’Institut congolais de la statistique souligne que le dernier recensement général date de 2012 et qu’un exercice ciblé sur les majeurs pourrait servir à la fois aux politiques publiques et au scrutin.
Dialogue politique en construction
Au-delà de la technique, le débat touche au contrat politique entre gouvernants et gouvernés. Pour le constitutionnaliste Antoine Dore, « une élection acceptée repose sur la perception de neutralité des arbitres ». Il plaide, sans juger le dispositif actuel, pour un renforcement visible de la concertation multipartite.
Dans sa déclaration, le R.f.c reproche au pouvoir de « refuser un dialogue sincère ». Les services du Premier ministre indiquent pourtant qu’une série de rencontres bilatérales se tiennent depuis juillet avec formations politiques et organisations de jeunesse, « dans la perspective d’un forum plus large d’ici la fin de l’année ».
Les leaders de l’opposition souhaitent inscrire ce forum dans une logique de compromis « historique ». Ils affirment vouloir éviter toute polémique stérile, mais préviennent qu’ils ne « cautionneront » pas un processus perçu comme fermé. L’équation, classique, consiste donc à équilibrer fermeté institutionnelle et gage de participation pluraliste.
Vers un scrutin apaisé en 2026
À mesure que s’approche 2026, la société civile se mobilise. Des collectifs de jeunes ingénieurs proposent des prototypes d’enrôlement mobile, capables de fonctionner hors réseau électrique. L’Observatoire congolais des droits de l’homme, quant à lui, forme déjà des observateurs pour couvrir, en toute impartialité, l’ensemble des circonscriptions électorales.
Pour le politologue Marc Filiekou, cette effervescence témoigne d’une maturation démocratique. « Le débat se déplace de la contestation frontale vers la codification des procédures », estime-t-il. Selon lui, la biométrie n’est qu’un élément du puzzle ; l’acceptation sociale du résultat dépendra d’abord de la confiance tissée avant le jour J.
Sur le terrain, les formations politiques peaufinent déjà leurs stratégies. Les partis au pouvoir multiplient les rencontres de proximité pour expliquer le programme gouvernemental, insistant sur la stabilité économique retrouvée. Le R.f.c et ses alliés, de leur côté, organisent des séminaires de formation de scrutateurs et affûtent leur projet sociétal.
Les diplomaties régionales observent cette dynamique avec intérêt. La CEEAC a annoncé l’envoi d’une mission d’évaluation préélectorale début 2026. À Libreville, un responsable souligne « l’importance d’un Congo-Brazzaville stable pour l’ensemble du bassin du fleuve ». Brazzaville assure accueillir ces partenaires « en toute transparence et sans agenda caché ».
À sept mois du scrutin, l’équation électorale conjointe de la réforme technique et du dialogue demeure ouverte. Gouvernement comme opposition connaissent l’enjeu : préserver la paix civile tout en consolidant l’autorité des urnes. Les prochaines semaines diront si ce double objectif trouvera, enfin, un terrain d’entente acceptable.
Car, au-delà des chiffres, c’est la confiance citoyenne qui consacrera, ou non, la pleine légitimité du futur président.