Pluies diluviennes sur Safi
Dans la nuit du 14 décembre, Safi, port Atlantique de la région Marrakech-Safi, a essuyé des pluies orageuses dépassant 60 millimètres. Des artères se sont muées en torrents, perturbant la circulation, inondant des habitations et provoquant un afflux soudain de blessés vers l’hôpital Mohammed V.
Les services météorologiques avaient signalé des variations brutales d’intensité, rendant difficile toute anticipation. Sur le terrain, les habitants se sont organisés à la hâte pour protéger biens et bétails, tandis que les sirènes d’alerte retentissaient dans plusieurs quartiers riverains de l’oued.
Un hôpital en alerte maximale
Avec l’augmentation rapide des appels d’urgence, le directeur de l’établissement, Khalid Iazza, a déclenché le plan interne de catastrophe. L’activation automatique a transformé, en quelques minutes, les couloirs ordinaires en un dispositif de triage, prêt à absorber un volume inhabituel de patients.
Au même moment, l’administration a libéré des salles polyvalentes et réaffecté le mobilier médical pour créer des unités d’accueil temporaires. La circulation interne a été balisée afin de séparer les blessés graves des consultations classiques, limitant ainsi les risques de saturation des postes névralgiques.
Organisation des secours médicaux
Les effectifs ont été rappelés par messages groupés. Urgentistes, infirmiers, brancardiers et équipes administratives ont convergé vers l’établissement malgré les axes coupés. Selon la direction, l’objectif consistait à atteindre, dès la première heure, un taux de présence supérieur à 90 % sur toutes les lignes.
Une cinquantaine de lits ont d’emblée été réservés aux victimes des inondations, avec la possibilité d’étendre la capacité grâce à des structures modulaires stockées en réserve. Le stock de draps isothermes, crucial pour traiter les hypothermies, a été vérifié et positionné au chevet.
Le service biomédical a confirmé la disponibilité des appareils de radiologie, d’échographie, des laboratoires et d’un scanner opérant en continu. Les groupes électrogènes avaient été testés la veille, assurant une autonomie suffisante pour couvrir d’éventuelles interruptions du réseau électrique municipal.
Parallèlement, plusieurs spécialistes en anesthésie, chirurgie orthopédique et neurochirurgie ont été rappelés. L’hôpital a organisé des quarts tournants de douze heures afin de maintenir, sur toute la durée de la crise, un plateau technique capable de répondre aux traumatismes les plus complexes.
Premiers bilans hospitaliers
Entre minuit et l’aube, les urgences ont traité 61 admissions liées aux intempéries. Les dossiers indiquent principalement des contusions, des fractures de membres supérieurs et plusieurs cas d’inhalation d’eau boueuse, survenus lors des opérations de dégagement des débris.
Deux patients, polytraumatisés après l’effondrement partiel d’un mur, ont été placés en réanimation. Leur état est jugé stable après stabilisation hémodynamique et imagerie complète. Les équipes demeuraient prêtes, si nécessaire, à procéder à une intervention neurochirurgicale en salle dédiée.
Dix-huit personnes, principalement des enfants et des personnes âgées, ont été admises pour hypothermie sévère. Les protocoles de réchauffement progressif par couvertures chauffantes et fluides tièdes ont été appliqués, avec une surveillance constante de la température corporelle et de la saturation en oxygène.
Treize blessés ont pu regagner leur domicile après soins et prescriptions, tandis que cinq demeuraient sous observation dans l’unité de traumatologie. La direction précise que les sorties sont décidées conjointement par les médecins référents et les services sociaux, afin d’assurer un suivi optimal.
Capacité d’adaptation et de résilience
Aucune rupture d’approvisionnement n’a été constatée. Les circuits de livraison protégés par le plan provincial ont permis de maintenir les stocks de médicaments, de sang et d’oxygène. De même, la chaîne alimentaire est restée fonctionnelle pour garantir repas chauds aux patients et au personnel.
Pour Khalid Iazza, la réactivité des équipes illustre « l’efficacité d’une formation régulière aux scénarios de catastrophe ». Selon lui, les exercices menés durant l’année ont familiarisé les agents avec les procédures de déclenchement, évitant perte de temps et confusion lors de la montée des eaux.
Le ministère de la Santé a salué, dans un communiqué, la coordination exemplaire entre services hospitaliers, protection civile et autorités locales. Il rappelle que l’état de préparation restera maintenu « aussi longtemps que les conditions météorologiques le dicteront », conformément aux directives nationales de gestion des risques.
À Safi, les habitants retrouvent progressivement leurs repères dans des rues encore boueuses. Pour beaucoup, la promptitude de l’établissement hospitalier constitue un motif d’apaisement. L’épisode rappelle, enfin, l’enjeu d’une planification sanitaire rigoureuse face aux aléas climatiques qui se répètent avec intensité.
Les responsables de l’hôpital prévoient déjà un débriefing détaillé pour recenser les points d’amélioration. L’accent portera sur la communication avec les familles, la rotation des ambulances et l’intégration des volontaires formés, afin d’optimiser encore la chaîne de secours lors de prochains épisodes.
À l’échelle de la région Marrakech-Safi, l’événement pourrait servir de catalyseur à une réflexion sur l’urbanisme résilient et la gestion des eaux pluviales. Les autorités locales envisagent d’actualiser les cartes d’inondabilité pour mieux guider, à l’avenir, les choix d’aménagement et la localisation des infrastructures sensibles.
