Un atelier décisif à Brazzaville
Réunis à Brazzaville le 27 novembre, soignants, représentants communautaires et partenaires ont examiné la toute nouvelle Charte du patient. L’initiative, portée par l’Observatoire congolais des droits des consommateurs, marque une nouvelle étape vers des services de santé plus inclusifs.
Ce rendez-vous s’inscrit dans un projet plus large dédié au renforcement de douze comités de santé rattachés aux districts de Brazzaville, avec pour ambition d’améliorer la gouvernance locale, la participation citoyenne et de réduire les plaintes adressées aux centres de santé intégrés.
Pour René Ngouala, président de l’OC2D, la mobilisation du terrain reste primordiale : « Sans l’implication des communautés, nos hôpitaux ne progresseront pas », a-t-il souligné face aux participants attentifs.
Comités de santé : un maillon à consolider
Le constat n’est pas nouveau. La revue nationale du secteur réalisée en 2018 avait pointé une faible appropriation des textes et un rôle encore timide des comités de santé, alors que ces instances doivent relayer la voix des usagers dans chaque formation sanitaire.
Le ministère de la Santé a donc réuni en avril 2023 un panel d’acteurs pour rédiger la Charte du patient, document fixant droits et devoirs des citoyens, mais aussi obligations pour les structures chargées de les accueillir.
À travers l’atelier de Brazzaville, la société civile veut passer du texte à l’action. Les participants ont revisité chaque article, discuté des cas pratiques et rappelé les sanctions prévues en cas de non-respect des engagements pris par les personnels de santé.
Conformément au décret 2020-553, les comités de santé doivent convoquer des assemblées générales pour élire bureau et commissaires aux comptes. L’opération est jugée essentielle pour asseoir la légitimité des Cosa et clarifier la responsabilité de chaque membre.
Après cette phase institutionnelle, une série de formations est prévue. Elles aborderont la tenue des registres, la gestion participative du budget et le suivi des indicateurs d’accueil, autant d’outils destinés à réduire les motifs récurrents de plaintes.
Les hôpitaux de référence ne sont pas oubliés. Des ateliers spécifiques leur seront dédiés afin de préciser le rôle des comités d’usagers, notamment dans l’évaluation de la qualité des actes médicaux et dans la promotion de la transparence tarifaire.
La Charte du patient s’ancre sur le terrain
Depuis le début de l’année, les mêmes modules ont déjà été déroulés à Pointe-Noire, Dolisie, Djambala et Ouesso. Ils ont permis de tester la Charte sur le terrain et d’identifier les messages jugés les plus parlants par les populations locales.
Les retours collectés montrent un besoin persistant d’information sur les tarifs, les horaires et la procédure de plainte. « Les usagers veulent savoir à qui s’adresser et dans quels délais ils obtiendront une réponse », résume Arvyne Mbadi, responsable sanitaire du district de M’Filou.
La Charte répond à ces attentes en listant clairement les temps d’attente raisonnables, le droit à l’information médicale et les recours ouverts à chaque patient. Elle insiste également sur la courtoisie et la confidentialité, éléments jugés déterminants pour restaurer la confiance.
Pour diffuser le document, l’OC2D misera sur des affiches dans les salles d’attente, des émissions radio en langues locales et une application mobile en cours de développement. L’objectif est de toucher le plus grand nombre, y compris dans les zones périphériques.
Les partenaires techniques, dont plusieurs organisations internationales, ont salué la démarche. Ils considèrent que la Charte du patient peut devenir un outil de référence pour d’autres pays d’Afrique centrale confrontés aux mêmes enjeux de gouvernance sanitaire.
Transparence et suivi pour pérenniser la réforme
Aucune réforme ne réussit sans suivi. L’OC2D envisage donc un baromètre annuel mesurant le nombre de comités réellement actifs, le taux de plaintes résolues et la satisfaction des usagers. Ces données seront partagées avec le ministère pour ajuster la stratégie.
En misant sur la transparence et la participation communautaire, le Congo-Brazzaville poursuit un objectif clair : rapprocher l’offre de soins des standards internationaux tout en préservant un pilotage national adapté à ses réalités.
Le chemin reste exigeant, mais la dynamique enclenchée à Brazzaville laisse entrevoir des avancées concrètes. Les prochaines semaines seront consacrées à l’adoption officielle de la Charte par les structures pilotes et à la planification des tournées de sensibilisation.
À terme, les responsables du projet espèrent que chaque citoyen connaîtra ses droits avant même de franchir le seuil d’un centre de santé. C’est sur cet engagement collectif que repose la promesse d’un système plus équitable et plus efficace.
Financement et reddition : prochaines étapes
Les communautés, de leur côté, s’engagent à participer activement aux assemblées et à signaler les dysfonctionnements de manière constructive. Cette coopération directe entre usagers et personnels soignants constitue un levier puissant pour améliorer l’accueil et la qualité clinique.
Les analystes rappellent qu’un appui financier solide reste indispensable : sans stocks réguliers de médicaments ni équipements entretenus, les prescriptions de la Charte risquent de demeurer théoriques et de freiner l’adhésion attendue des usagers.
Le ministère de la Santé prévoit pour sa part de publier, chaque trimestre, un compte rendu des progrès réalisés dans les douze districts concernés. Ce rapport public, accessible en ligne et affiché dans les centres de santé, doit renforcer la confiance et inciter les équipes à maintenir leurs efforts.
