Un passage de relais stratégique
Réunis à Brazzaville pour leur septième session, les ministres des Transports de la CEMAC ont confié la présidence de leur comité à la République du Congo. Ingrid Olga Ghislaine Ebouka-Babackas succède ainsi au Centrafricain Herbert Gotran Ndjono-Ahaba à la tête de l’Assac-Ac.
La cérémonie, organisée le 17 octobre, a mis en avant la continuité des objectifs fixés lors des mandats précédents. Le président sortant a salué « la quête perpétuelle d’efficacité » de sa successeure et l’a encouragée à consolider les acquis obtenus depuis 2021.
Trois priorités pour un ciel plus sûr
Dans son discours d’investiture, la ministre congolaise a décliné un programme centré sur la sécurité opérationnelle. Première priorité : anticiper l’évolution rapide du transport mondial en dotant l’agence d’outils de supervision adaptés. Elle a insisté sur la nécessité de décisions courageuses et d’une coopération renforcée entre États.
La seconde priorité vise la sécurisation durable des ressources financières, condition indispensable pour garantir l’indépendance des inspecteurs et le maintien de standards élevés. Enfin, la formation continue des professionnels arrive en troisième position, afin que les contrôleurs, ingénieurs et juristes maîtrisent les nouvelles réglementations internationales.
Financement durable de l’agence régionale
Le bilan dressé par Herbert Ndjono-Ahaba met en lumière la progression budgétaire permise par la Redevance de sécurité aérienne régionale. Cinq pays la collectent déjà ; le Gabon finalise son déploiement. Résultat : un budget doublé, offrant à l’agence une marge de manœuvre accrue.
Le président sortant a néanmoins rappelé que l’application pleine des règlements communautaires nécessite des autorités nationales autonomes dotées de personnalité juridique. « Sans ces relais, l’agence ne pourra pas atteindre ses ambitions », a-t-il commenté, en appelant à une mobilisation immédiate des gouvernements.
Capital humain et formation continue
Le docteur Francial Giscard Baudin Libengué Dobelé-Kpoka, commissaire de l’Assac-Ac, a insisté sur la priorité accordée au renforcement des compétences. Les recrutements récents dans les domaines technique, juridique, informatique et administratif ont déjà professionnalisé la structure régionale.
Il reste pourtant à consolider ces succès par un programme de formation ciblé sur la gestion des crises, la cybersécurité et la sécurité des opérations. Pour le commissaire, l’audit externe en cours constituera une base pour ajuster les plans et attirer des partenaires spécialisés.
Transparence et gouvernance renforcées
L’audit externe mentionné doit aboutir dans les prochains mois. Il évaluera l’efficacité des procédures internes et la gestion des fonds issus de la redevance. Les résultats devraient guider l’Assac-Ac vers une gouvernance plus transparente, facteur clé pour convaincre de nouveaux bailleurs.
Ingrid Ebouka-Babackas a souligné l’importance de cet exercice, rappelant que la crédibilité de l’agence dépend de la clarté de ses comptes. Elle compte s’appuyer sur des partenariats internationaux pour accompagner la mise en œuvre des recommandations attendues.
Respect des engagements financiers
Le non-versement régulier des cotisations égalitaires reste un point de vigilance. Au cours de la réunion, plusieurs délégations ont réaffirmé leur détermination à s’acquitter de leurs obligations dès le premier trimestre prochain, afin de sécuriser le plan d’action 2024-2026.
Le commissaire Dobelé-Kpoka a rappelé que chaque retard fragilise les audits IOSA des compagnies basées en Afrique centrale. « Notre crédibilité face aux autorités de l’aviation civile mondiale dépend du respect de nos échéances », a-t-il insisté.
Harmonisation réglementaire accélérée
Sur le plan normatif, l’agence a fait adopter des règlements d’exécution visant à unifier les obligations de sécurité dans la sous-région. Les textes doivent désormais être transposés dans les législations nationales d’ici fin 2026, objectif que la nouvelle présidente veut tenir.
Elle a invité les parlementaires nationaux à inscrire rapidement ces textes à l’agenda législatif. « Chaque mois de retard retarde la certification des aéroports et des compagnies », a-t-elle averti, rappelant que l’Organisation de l’aviation civile internationale évalue régulièrement les États sur ces critères.
Implication de la société civile
La société civile est appelée à promouvoir la culture de la sécurité aérienne. Organisations de consommateurs, associations de voyageurs et médias spécialisés pourront relayer les bonnes pratiques et alerter sur les manquements identifiés.
Cette approche inclusive doit, selon la direction de l’Assac-Ac, contribuer à instaurer un climat de confiance entre passagers, compagnies et régulateurs. Le Congo-Brazzaville souhaite en faire un pilier de son mandat, convaincu que la vigilance citoyenne complète l’action publique.
Calendrier et attentes régionales
Les ministres ont adopté une feuille de route allant jusqu’à 2026. Elle fixe des jalons précis : finalisation de l’audit externe, montée en puissance de la redevance régionale, certification de trois aéroports supplémentaires et lancement d’un centre de formation sous-régional.
À l’issue des travaux, Ingrid Ebouka-Babackas a affirmé que l’Afrique centrale dispose désormais des leviers pour se hisser au niveau des meilleures pratiques mondiales. Les capitales de la CEMAC scrutent les premiers résultats ; le ciel sous-régional gagne déjà en visibilité.