Une feuille de route parlementaire renforcée
La salle des commissions sénatoriales grouillait d’activité le 21 août, lorsque Aristide Ngama Ngakosso, président du groupe d’amitié Congo-France, a accueilli l’ambassadrice de France, Claire Bodonyi. Au programme, passer en revue l’avancée du mémorandum de coopération signé par les deux Sénats en 2024.
Le document, salué des deux côtés comme un outil souple et évolutif, entend consolider un partenariat législatif inauguré il y a près de quarante ans. Il prévoit des ateliers conjoints, des missions croisées et un suivi régulier afin d’ancrer le dialogue interparlementaire dans la durée.
Un dialogue institutionnel stratégique
Façonné comme un complément indispensable à la diplomatie exécutive, le canal parlementaire offre un espace où la diversité des territoires s’exprime. « Les sénateurs portent la voix de proximité ; cet enracinement aiguise leur regard sur les politiques publiques », rappelle Aristide Ngama Ngakosso en sortie de séance.
Claire Bodonyi souligne, pour sa part, l’intérêt de mettre les élus face aux mêmes problématiques globales que rencontrent leurs collectivités : transition énergétique, mobilité humaine, régulation numérique. Selon la diplomate, ces sujets exigent une approche comparée permettant de confronter les expériences sans jamais gommer les spécificités nationales.
Transition énergétique : expériences croisées
Le segment énergie occupe une place centrale dans le mémorandum. La France, engagée dans un débat serré autour du mix éolien, partage volontiers ses études d’acceptabilité sociale et ses cadres incitatifs. Le Congo, fort de son potentiel hydraulique et solaire, veut tirer parti de ces retours d’expérience.
Les groupes de travail préparent déjà une session sur la fiscalité verte et la planification territoriale des infrastructures. « Nous ne partons pas d’une page blanche ; la loi congolais sur la transition énergétique gagne à s’inspirer d’expérimentations étrangères tout en restant adaptée au contexte local », précise un conseiller technique du Sénat.
Au-delà des aspects techniques, les deux délégations plaident pour un accompagnement citoyen soutenu, convaincues qu’adhésion populaire et réussite industrielle demeurent indissociables. Un calendrier de visites de sites pilotes, en France comme au Congo, est envisagé pour 2025.
Mobilité et politiques migratoires concertées
La mobilité humaine, souvent réduite aux flux Sud-Nord, figure en bonne place dans les échanges. Paris a présenté le fonctionnement de son Office français de l’immigration et de l’intégration, tandis que Brazzaville a détaillé ses programmes de formation de la diaspora.
Les parlementaires congolais souhaitent rendre plus lisibles les parcours de retour volontaire. Dans la perspective, un séminaire binational traitera de l’harmonisation des données statistiques et de la reconnaissance des qualifications professionnelles acquises à l’étranger.
« Chaque pays demeure souverain, mais la transparence nourrit la confiance », résume un sénateur français. Les participants espèrent que ce dialogue atténuera les crispations liées aux offres d’emploi transfrontalières et facilitera la mobilité étudiante, ressource majeure pour l’économie du savoir.
Face à la désinformation : réponse coordonnée
Le défi informationnel constitue l’autre pilier du programme de coopération. Les réseaux sociaux ont démultiplié la vitesse de circulation des rumeurs, parfois au détriment de relations bilatérales apaisées. Les deux chambres planchent sur un protocole d’échange rapide d’alertes.
Des ateliers mêlant journalistes, universitaires et juristes sont prévus afin d’élaborer des outils de vérification adaptés aux réalités locales. Le Congo entend profiter du retour d’expérience français en matière de sensibilisation des publics scolaires et d’autorégulation des plateformes.
Pour la diplomate Claire Bodonyi, « la meilleure défense reste la confiance mutuelle ». Un rapport annuel, rédigé conjointement, dressera l’état des campagnes de désinformation identifiées et les réponses institutionnelles apportées, sans verser dans la censure ni la méfiance généralisée.
Vers un partenariat législatif durable
Signe de la solidité du projet, un comité de pilotage paritaire se réunira chaque semestre pour évaluer les résultats obtenus et ajuster la trajectoire. Cette gouvernance légère garantit réactivité et appropriation par l’ensemble des sénateurs intéressés.
Le président du Sénat congolais, Pierre Ngolo, appelé par visioconférence, a salué « un modèle de coopération moderne, axé sur le partage d’expertise et la diplomatie des solutions ». Son homologue français ne cache pas son enthousiasme pour « une expérimentation exportable à d’autres parlements africains ».
Alors que le mémorandum entre progressivement en phase opérationnelle, observateurs et acteurs soulignent l’équilibre trouvé entre ambition politique et pragmatisme technique. Si l’exécution reste la clé, le climat de confiance affiché à Brazzaville augure d’une collaboration pérenne, bénéfique aux citoyens des deux rives.