Un appui stratégique au système transfusionnel
Dans un geste salué par le corps médical, le ministre de la Santé et de la Population, Pr Jean-Rosaire Ibara, a remis au Centre national de transfusion sanguine un lot conséquent de matériels de prélèvement et 46 000 poches stériles, renforçant ainsi les capacités opérationnelles de l’établissement.
Cette dotation s’inscrit dans le cadre du projet Kobikissa, financé par la Banque mondiale, qui cible l’amélioration durable de la santé reproductive, maternelle et infantile dans l’ensemble du pays, en particulier chez les populations vulnérables vivant loin des grands plateaux techniques hospitaliers.
Un dispositif financé par la Banque mondiale
Le partenariat établi avec l’institution financière multilatérale apporte non seulement des ressources matérielles, mais aussi un accompagnement technique axé sur le contrôle de qualité, l’hémovigilance et la formation continue des équipes locales, condition essentielle pour garantir la sécurité transfusionnelle recommandée par l’Organisation mondiale de la santé.
Selon le coordonnateur du projet, Mbon Darius Essié, l’objectif budgétaire global est de consolider un réseau d’approvisionnement fiable, capable de couvrir le pays à raison de trois cents dons pour dix mille habitants, seuil considéré comme minimum par les standards internationaux en vigueur.
Réduire la mortalité maternelle et infantile
Dans de nombreux districts, les hémorragies obstétricales demeurent la première cause de décès chez les femmes en couches, tandis que l’anémie sévère frappe encore un enfant sur deux dans certaines zones rurales, d’après les dernières données du comité national sur la santé maternelle.
En dotant le Cnts d’un volume conséquent de poches et de fauteuils de prélèvement, les autorités espèrent réduire les délais d’acheminement du sang, rendant possibles des transfusions en moins d’une heure après la prescription, délai jugé vital par les obstétriciens de l’hôpital mère-enfant de Makélékélé.
Le ministère mise également sur la sensibilisation des donneurs volontaires, notamment parmi les jeunes et les fonctionnaires, afin de constituer un stock tampon de sécurité équivalant à huit jours de consommation, seuil recommandé lors des campagnes de lutte contre le paludisme et les épidémies virales.
Modernisation des structures régionales
Parallèlement à Brazzaville, des équipements similaires ont été acheminés vers les hôpitaux généraux de Ouesso, Djambala et Owando, permettant aux techniciens de laboratoire de procéder sur place à la qualification biologique du don, étape cruciale pour dépister les agents pathogènes transmissibles.
Le chef de service transfusionnel de Ouesso, Dr Gilbert Boukaka, se félicite d’un « saut qualitatif sans précédent » qui, estime-t-il, réduira les transferts onéreux vers la capitale et soulagera les familles confrontées à des distances parfois supérieures à six cents kilomètres.
Avec ces nouveaux dispositifs, chaque département bénéficiera d’un registre électronique de suivi des stocks, interfacé avec la plateforme nationale e-Santé, afin d’anticiper les ruptures et de planifier les campagnes de collecte mobile durant les périodes à forte demande, comme la saison des pluies.
Voix des acteurs de santé
Pour la présidente de l’Association congolaise des sages-femmes, Mireille Nzongo, l’arrivée de poches homologuées « rassure les patientes encore réticentes à recevoir du sang ». Elle souligne toutefois la nécessité d’intensifier l’éducation communautaire afin de déconstruire les mythes persistants autour du don thérapeutique dans les quartiers.
Côté partenaires, l’Unicef rappelle que chaque unité transfusée à temps sauve au moins trois vies, et envisage de soutenir, avec d’autres agences, la création de clubs scolaires de donneurs volontaires, afin d’ancrer la culture du don dans les nouvelles générations.
Le président du Conseil de l’Ordre des médecins, Dr Rodrigue Okoko, insiste sur l’importance de la traçabilité numérique des dons et annonce qu’un module universitaire dédié à la gestion du sang sera intégré dès la prochaine rentrée dans le cursus des étudiants en pharmacie nationaux.
Vers une autosuffisance en produits sanguins
À moyen terme, le ministère ambitionne d’atteindre l’autosuffisance totale en produits sanguins labiles, en recourant exclusivement au don bénévole, anonyme et non rémunéré, modèle reconnu pour sa durabilité et sa sûreté par la Fédération internationale des organisations de donneurs de sang dans le pays.
Les experts estiment néanmoins que l’objectif nécessitera une mise à niveau constante des infrastructures frigorifiques, la disponibilité d’équipements de transport réfrigéré et une sécurisation budgétaire pluriannuelle, afin d’éviter les ruptures souvent observées lorsque les financements extérieurs se terminent ou se réorientent vers d’autres priorités nationales de santé.
Pour l’instant, l’arrivée des nouveaux kits représente une avancée tangible que les responsables sanitaires qualifient de « tournant décisif ». Reste à transformer l’élan en routine, grâce à la mobilisation citoyenne et au suivi rigoureux des indicateurs de performance établis par le ministère compétent lui-même.
Innovation numérique au service du don
Une application mobile baptisée Sanguis, actuellement en phase pilote, devrait alerter les donneurs inscrits lors de niveaux critiques de stock et leur proposer les points de collecte les plus proches, réduisant ainsi le temps de réponse et améliorant la prévisibilité de l’offre sur tout le territoire.
Le développeur principal, Arnaud Badinga, explique que la plateforme utilise des données anonymisées du Cnts pour cartographier en temps réel la demande régionale, offrant aux planificateurs un outil d’aide à la décision complémentaire aux canaux classiques de suivi papier et aux tableaux muraux.