Une offensive diplomatique en Amérique latine
Depuis une semaine, la République du Congo déploie une intense diplomatie de terrain pour soutenir la candidature de Firmin Édouard Matoko à la direction générale de l’Unesco.
Conduite par le ministre d’État Pierre Mabiala, la délégation congolaise a choisi l’Amérique latine comme premier terrain d’expression, avec un itinéraire qui la mène du Chili au Paraguay avant une halte annoncée à Buenos Aires.
Rencontre au sommet à Asunción
Mercredi 10 septembre, à 11 heures locales, l’équipe congolaise a franchi les portes du ministère paraguayen des Affaires étrangères, où Ruben Ramirez Lezcano les attendait dans la capitale, Asunción.
Les visages détendus, les deux délégations se sont installées autour d’une même table et, dès les premiers échanges, un climat de cordialité s’est imposé, ouvrant la voie à une discussion sur les priorités communes.
Les atouts de Firmin Édouard Matoko
Au centre de l’agenda figurait évidemment la candidature portée par Brazzaville, présentée comme l’expression d’« une Afrique constructive et ouverte sur le monde », selon la formule choisie par Pierre Mabiala au cours de l’entretien.
Le chef de la diplomatie paraguayenne a, de son côté, souligné qu’il « connaissait déjà la trajectoire impressionnante de M. Matoko au sein de l’Unesco » et qu’il voyait dans son projet « une ambition susceptible de servir toutes les régions ».
Ces propos venaient conforter la stratégie congolaise : démontrer que la stature du candidat dépasse les clivages géographiques et qu’elle s’inscrit dans la logique du multilatéralisme prôné par l’organisation onusienne.
Un message présidentiel remis en main propre
Mandaté par le président Denis Sassou Nguesso, Pierre Mabiala a profité de l’audience pour remettre à Ruben Ramirez Lezcano une lettre personnelle destinée au chef de l’État paraguayen, Santiago Peña, rappelant l’importance que Brazzaville accorde à ce scrutin international.
Le ministre paraguayen a promis d’en assurer la transmission « avec diligence », un engagement que la partie congolaise a salué comme « un geste d’amitié » renforçant une relation bilatérale déjà marquée par la confiance.
Coopération Paraguay–Congo en perspective
Au-delà de l’épreuve électorale, les deux gouvernements ont affirmé vouloir donner du contenu à leur rapprochement, évoquant l’agriculture, la formation et l’échange d’expériences dans les organisations internationales comme domaines de coopération possibles.
La délégation de Brazzaville voit dans cette ouverture une manière de consolider son influence sur la scène latino-américaine, considérée comme un relais important dans la dynamique électorale multilatérale.
Cap sur l’Argentine
Prochaine escale, l’Argentine : Pierre Mabiala doit y rencontrer plusieurs hauts responsables afin de poursuivre la même démarche, toujours centrée sur la promotion d’une candidature « inclusive et tournée vers l’expertise ».
Le ministre d’État insiste sur la cohérence de l’itinéraire : « Nous dialoguons avec toutes les régions, car le futur de l’Unesco se construira sur un équilibre d’intérêts et de visions », a-t-il expliqué à la presse.
En privilégiant un contact direct avec les décideurs, Brazzaville défend une méthode jugée plus humaine que les seules notes verbales : ce face-à-face permet, selon les membres de la délégation, de « raccrocher le projet aux réalités locales ».
Un pont culturel entre continents
Le choix de l’Amérique latine n’est pas anodin : la région partage avec le Congo-Brazzaville une sensibilité aux enjeux patrimoniaux, linguistiques et culturels que l’Unesco défend depuis sa création.
Pour la partie congolaise, cette convergence offre un terrain de dialogue qui dépasse la seule élection, et pourrait, à terme, favoriser des projets conjoints dans l’éducation ou la préservation des sites classés.
Alors que la campagne bat son plein, les diplomates congolais restent toutefois prudents, rappelant que rien n’est acquis et que chaque rencontre vise d’abord à « écouter les attentes » de leurs interlocuteurs.
Ils estiment que cette prudence nourrit la crédibilité du candidat, présenté non comme un conquérant, mais comme un futur directeur général soucieux de rassembler autour d’objectifs partagés.
Un rendez-vous inscrit dans la durée
À Asunción, au terme de l’entretien, Pierre Mabiala a remercié son hôte pour un accueil qu’il a qualifié de « fraternel » et a réaffirmé sa confiance dans la capacité du Paraguay à apprécier, « le moment venu », la portée de la vision défendue.
De retour vers l’aéroport Silvio Pettirossi, la délégation se préparait déjà pour Buenos Aires, convaincue que la constance de sa diplomatie de proximité finira par transformer les gestes de sympathie en soutiens effectifs au sein de l’Unesco.
Héritage diplomatique et convergences
Les diplomates congolais rappellent que cette campagne s’appuie sur des décennies de participation du Congo-Brazzaville aux organes onusiens, un héritage que Firmin Édouard Matoko incarne pour avoir œuvré dans plusieurs départements de l’Unesco au cours de sa carrière internationale.
Selon eux, cette dimension historique contribue à rassurer les partenaires rencontrés, car elle témoigne d’une continuité stratégique et d’un engagement durable, loin d’une simple opération électorale ponctuelle.
Côté paraguayen, plusieurs conseillers présents ont souligné des convergences inattendues, notamment la gestion des ressources naturelles et la promotion des langues minoritaires, deux thèmes régulièrement portés par Brazzaville dans les enceintes internationales.
Si aucun engagement écrit n’a été rendu public, les observateurs proches du dossier estiment que ces points de convergence pourraient, à moyen terme, déboucher sur des initiatives conjointes visibles, consolidant ainsi la présence congolaise sur la scène multilatérale.