Un réseau en quête de deuxième souffle
Installés dans une salle associative de Brazzaville, militantes et représentants de la société civile se sont retrouvés le 25 septembre 2025. Au centre des échanges : la relance du Réseau national des associations de lutte contre les violences sexospécifiques au Congo, en sommeil depuis plusieurs mois.
Créé en 2011 pour mutualiser les initiatives citoyennes, le RENALVISCO avait perdu de sa cohésion. L’enjeu est désormais de recréer une dynamique collective, sans mettre de côté l’héritage accumulé depuis plus d’une décennie d’actions de terrain et de plaidoyer auprès des autorités.
Une coordinatrice déterminée
Face à l’assistance, Mme Jocelyne Milandou-Kanza, coordonnatrice du réseau, a rappelé l’urgence : « Il est essentiel de passer à une étape cruciale, celle du renouvellement de nos instances, afin d’exécuter notre feuille de route. » Son ton, à la fois ferme et rassembleur, a donné le tempo.
Elle a souligné que « la dignité est inhérente à chaque être humain, conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme ». Pour la militante, relancer le RENALVISCO revient donc à redonner voix aux victimes et légitimité à celles et ceux qui les accompagnent quotidiennement.
Violences sexospécifiques, un enjeu national
Les données issues d’études menées sur l’ensemble du territoire confirment la persistance d’actes sexistes ou sexuels visant principalement femmes, filles et enfants. Aucun département du Congo-Brazzaville n’échappe au phénomène, qu’il s’exprime dans l’espace public, familial ou scolaire.
Parce que ces violences minent le tissu social, leur traitement mobilise autant les associations que les structures de santé et de justice. Le réseau entend ainsi encourager les survivantes à se tourner vers médecins, psychologues ou magistrats, et à briser le silence qui protège encore trop souvent les agresseurs.
Le comité préparatoire à l’œuvre
Au terme de la réunion, huit volontaires ont été désignés pour constituer le comité préparatoire. Leur mandat : passer en revue les statuts, moderniser le règlement intérieur et proposer une architecture institutionnelle adaptée aux défis actuels.
L’exercice, minutieux, devra être bouclé avant une séance de pré-validation. Ce rendez-vous intermédiaire fixera le cadre de l’assemblée générale élective de décembre, où les membres voteront pour une nouvelle direction et adopteront la version définitive des textes fondateurs.
Un partenariat stratégique
Depuis le début de l’année, Catholic Relief Services (CRS) soutient financièrement et techniquement les activités de redynamisation. L’ONG a choisi de consolider l’expertise locale plutôt que de dupliquer des dispositifs existants, selon une logique de complémentarité déjà éprouvée sur d’autres programmes sociaux.
Ce partenariat permet d’organiser ateliers, déplacements et impressions de documents. Surtout, il garantit l’indépendance du processus vis-à-vis de pressions extérieures, en offrant au réseau la marge budgétaire nécessaire pour consulter largement la base associative et intégrer de nouveaux acteurs.
Un agenda serré jusqu’à décembre
Les prochaines semaines seront rythmées par plusieurs sessions de travail. Chaque article des statuts, adopté en 2011, est relu ligne par ligne pour refléter la réalité de 2025 : évolution des législations, multiplication des cas signalés, montée en puissance des réseaux sociaux dans la dénonciation.
Selon le calendrier annoncé, la pré-validation interviendra avant la fin novembre. Elle vise à s’assurer que l’ensemble des sensibilités régionales et professionnelles soit représenté, condition sine qua non pour une appropriation durable des nouvelles orientations par les membres.
Des attentes de terrain
Dans les couloirs, les associations locales partagent leurs espoirs. Une responsable venue de Pointe-Noire souhaite « un réseau plus visible et plus réactif pour accompagner les victimes dès la première plainte ». Un psychologue évoque la nécessité de formations croisées entre juristes et soignants.
Tous convergent vers un objectif : renforcer la confiance du public. Car si les violences sont documentées, la démarche judiciaire reste souvent perçue comme longue ou intimidante. Le RENALVISCO veut donc fournir un appui plus lisible, en particulier dans les zones rurales où l’offre de services est limitée.
Rôle de l’État et complémentarité associative
Le réseau évolue dans un écosystème où l’action publique demeure centrale. Les autorités congolaises, engagées dans la promotion des droits humains, encouragent la synergie entre institutions et société civile. La relance du RENALVISCO doit s’inscrire dans cet esprit de complémentarité constructive, sans chevauchement des compétences.
En misant sur la concertation, les associations espèrent fluidifier l’orientation des victimes vers les unités spécialisées de la police, les hôpitaux de référence ou les tribunaux. Ce maillage, déjà partiellement opérationnel, gagnerait en efficacité si la coordination associative se renforce.
Une assemblée générale décisive
L’assemblée de décembre ne se limitera pas à un exercice bureaucratique. Elle pourrait marquer le renouveau d’un mouvement citoyen structuré, capable de produire des données fiables, de mener des campagnes nationales et d’interpeller les décideurs sur la base d’une expertise reconnue.
La feuille de route, en cours de rédaction, définira des indicateurs précis : nombre de victimes accompagnées, séminaires de sensibilisation réalisés, partenariats institutionnels signés. Autant d’éléments mesurables qui permettront d’évaluer l’impact du réseau sur la réduction des violences sexospécifiques.
Perspectives et responsabilités
À l’issue de la réunion préparatoire, Mme Milandou-Kanza a lancé un appel : « Nous souhaitons que les victimes parlent de plus en plus de leurs expériences et se rapprochent des professionnels. » Ses mots résument l’ambition d’une société où le silence ne serait plus une fatalité.
Le succès du processus repose désormais sur la capacité du comité à maintenir la mobilisation, à intégrer les nouveaux adhérents et à garantir la transparence de l’élection à venir. Les partenaires, dont CRS, resteront attentifs aux besoins exprimés pour assurer un accompagnement adapté.