Une initiative inscrite dans les priorités nationales d’assainissement
À l’approche de la fête nationale de l’indépendance, le ministre de l’Assainissement, du Développement local et de l’Entretien routier, Juste Désiré Mondélé, a confirmé la tenue, le 5 juillet, d’une opération de déguerpissement visant à restituer trottoirs, artères et places publiques à leur vocation initiale. L’annonce intervient dans un contexte où l’occupation anarchique de l’espace urbain, malgré de multiples campagnes de sensibilisation, demeure un défi récurrent pour la municipalité de Brazzaville.
Placée sous le sceau d’un « assainissement durable », l’initiative entend conjuguer efficacité logistique et respect du cadre légal, conformément aux orientations du Plan national de développement 2022-2026, qui promeut la valorisation du patrimoine urbain et la sécurité des populations.
Civisme urbain et impératif sanitaire
Depuis plusieurs années, l’accumulation de dépôts sauvages d’ordures et la prolifération de commerces informels le long des axes routiers accentuent les risques épidémiologiques, notamment en période de pluies abondantes où les eaux stagnantes favorisent la transmission de maladies hydriques. Les autorités mettent en avant la corrélation entre la salubrité de l’environnement immédiat et la santé publique, rappelant que la ville s’inscrit dans l’Objectif 11 de l’Agenda 2030 des Nations unies, relatif à des cités sûres et durables.
En renforçant la propreté des voiries, le gouvernement espère non seulement réduire la charge sanitaire supportée par les ménages, mais aussi améliorer l’attractivité touristique de la capitale, régulièrement saluée pour son front de fleuve mais encore perfectible dans la gestion des déchets.
Articuler formel et informel : l’économie de rue à l’épreuve du droit
L’économie de rue, qui assure des revenus à des milliers de ménages, constitue un maillon essentiel, mais souvent invisible, du tissu socio-économique congolais. Les pouvoirs publics avancent l’argument d’une requalification progressive plutôt qu’une simple éviction : les vendeurs sont invités à rejoindre les marchés domaniaux réhabilités ou de nouveaux sites identifiés par les municipalités.
Cette transition s’appuie sur des études menées par des sociologues urbains locaux, montrant qu’une formalisation encadrée permet d’accroître la sécurité des transactions et de générer des recettes fiscales additionnelles sans tarir l’esprit entrepreneurial. Les organisations de marchands, reçues en amont par le ministère, plaident toutefois pour un accompagnement renforcé afin d’amortir les coûts de relocalisation.
De la pédagogie au contrôle : méthode et calendrier opératoire
Le dispositif repose sur une phase de sensibilisation de 48 heures, durant laquelle administrateurs-maires, chefs de quartier et comités de marché vulgarisent les consignes auprès des occupants. À partir du 4 juillet, une « descente pédagogique » doit servir d’ultime rappel avant l’entrée en action, le lendemain, de la force publique et des services techniques chargés de l’enlèvement des épaves et de la collecte des déchets.
Selon le ministère, l’objectif n’est pas la sanction pour elle-même, mais la restauration d’un cadre de vie régulé. La mobilisation transversale – police, voirie, services de la santé, associations de jeunesse – vise à limiter les frictions et à garantir un résultat visible dès les premières 72 heures, tout en évitant la reconstitution rapide des points de vente sauvages.
Le précédent de 2023, un laboratoire pour 2024
Les opérations menées en octobre 2023, en marge du Sommet des trois bassins des écosystèmes de biodiversité, avaient déjà permis de tester la coordination inter-services. À l’époque, les observateurs avaient salué la baisse sensible des dépôts clandestins, même si certains commerçants étaient revenus occuper les trottoirs quelques semaines plus tard.
Le retour d’expérience a nourri la démarche actuelle : renforcement du suivi post-opération, plan de patrouilles régulières, et création d’une cellule de veille citoyenne chargée de signaler les récidives. En inscrivant l’action dans la durée, les autorités espèrent pérenniser les gains obtenus et ancrer un réflexe de civisme dans le quotidien des usagers.
Vers une gouvernance urbaine collaborative et pérenne
Au-delà de l’enlèvement de baraques ou d’épaves, c’est la question de la gouvernance de l’espace public qui se trouve au cœur du débat. Le ministère plaide pour une coproduction des politiques urbaines, impliquant collectivités locales, organisations professionnelles et société civile, afin de concilier droit au travail, fluidité de la circulation et préservation de l’environnement.
Divers partenaires techniques, dont l’Agence française de développement et la Banque africaine de développement, ont exprimé leur disponibilité à accompagner des programmes intégrés de modernisation des marchés et de gestion des déchets. À terme, la réussite de l’opération du 5 juillet pourrait servir de modèle à d’autres villes du pays, en réaffirmant que la propreté est un bien commun qui transcende les appartenances partisanes.