Aux rives du fleuve, Brazzaville enchanteur
Point d’orgue de toute découverte, Brazzaville cumule l’effervescence d’une capitale africaine et la quiétude d’une cité fluviale. Depuis la silhouette moderniste de la tour Nabemba jusqu’aux arcatures de la Basilique Sainte-Anne, l’urbanisme dialogue avec un patrimoine spirituel et artistique singulier. Dans les travées du Marché Total, les effluves de manioc fermenté rejoignent les éclats des étoffes wax, tandis que la rue du Djoué, bordée d’ateliers, fait office de laboratoire créatif pour la nouvelle génération d’artistes sortis de l’École de peinture de Poto-Poto.
Les autorités municipales misent sur la réhabilitation des berges pour reconnecter la population avec le fleuve, à l’instar du projet de promenade aménagée entre le Palais du Peuple et le pont du 15 Août. Cette politique d’embellissement accompagne la consolidation d’un secteur hôtelier en pleine croissance, reflet d’une volonté gouvernementale de positionner Brazzaville comme hub diplomatique et porte d’entrée du tourisme congolais.
Forêts nordiques : un laboratoire de conservation
À plus de sept cents kilomètres au nord, le complexe des parcs d’Odzala-Kokoua et de Nouabalé-Ndoki forme l’un des derniers bastions de la méga-biodiversité équatoriale. Sur treize mille kilomètres carrés, clairières inondées, marécages et forêts sempervirentes abritent quelque 25 % des gorilles de plaine occidentaux recensés dans le monde, sans oublier chimpanzés, éléphants de forêt et plus de quatre cents espèces d’oiseaux. Les programmes de suivi génétique conduits par la Fondation Odzala et l’Institut congolais pour la conservation de la nature s’appuient sur des écoguides issus des villages riverains, instaurant une forme d’économie circulaire où la préservation des écosystèmes garantit des emplois qualifiés.
La stratégie nationale de tourisme durable, actualisée en 2023, érige ces zones protégées en vitrines du savoir-faire congolais en matière d’écotourisme. Lodges à faible empreinte carbone, taxation verte et charte d’éthique pour le pistage des primates complètent un arsenal réglementaire destiné à conjurer la tentation du tourisme de masse.
Littoral Atlantique : mémoire, loisirs et biodiversité
Pointe-Noire, deuxième ville du pays, s’ouvre sur la « côte sauvage », bande littorale encore préservée du mitage balnéaire. Les gorges rougeoyantes de Diosso y répondent aux vagues ourlées d’écume de Pointe-Indienne, tandis que le parc marin de Conkouati-Douli fait figure de sanctuaire pour tortues luths, dauphins et lamantins. Les pêcheurs Vili, dépositaires d’une tradition séculaire, organisent désormais des sorties en pirogue pour observer la ponte des tortues entre novembre et février, activité dont les revenus soutiennent les micro-projets communautaires d’adduction d’eau.
Le littoral s’inscrit également dans une démarche mémorielle. À quelques kilomètres des plages, le musée Ma-Loango, installé dans l’ancien palais royal de Diosso, présente des artefacts qui retracent l’histoire du royaume Loango et les trajectoires atlantiques de la période pré-coloniale. Cette mise en récit contribue à enrichir l’expérience du visiteur tout en consolidant le tissu identitaire local.
Entre savanes et plateaux : l’épopée de l’intérieur
Au sud-est, le plateau Bateke déploie des paysages tabulaires où alternent prairies graminées, galeries forestières et méandres sableux. Les chercheurs de l’Université Marien-Ngouabi y mènent des études sur la résilience des herbacées face aux régimes de feux, soulignant la valeur scientifique de ces espaces peu fréquentés. Plus au nord, le mont Nabemba, point culminant du pays du haut de ses 1 020 mètres, offre un promontoire idéal pour saisir l’ampleur du bassin du Congo, deuxième poumon vert de la planète.
Les réserves communautaires de Lesio-Louna et Lefini, fondées durant les années 1990, illustrent quant à elles la transition d’une gestion strictement étatique vers un modèle partenarial associant ONG, secteur privé et collectivités locales. La réintroduction progressive d’éléphants de savane et la création de corridors pour les buffles témoignent d’un volontarisme salué par plusieurs agences des Nations unies.
Vers un tourisme responsable, moteur de diversification
Longtemps adossée à la rente pétrolière, l’économie congolaise cherche désormais des relais de croissance plus inclusifs. Selon la Banque centrale du Congo, les recettes touristiques ont progressé de 18 % entre 2019 et 2023, tirées par la hausse des arrivées régionales et le développement de segments de niche, notamment l’ornithologie et le tourisme scientifique. Pour consolider cette tendance, le gouvernement appuie la mise en place d’un visa électronique et la modernisation de la ligne ferroviaire Congo-Océan, élément clef pour relier la capitale au littoral sans augmenter l’empreinte carbone.
Diplomates et investisseurs observent de près cette diversification qui fait écho aux Objectifs de développement durable. Comme le souligne le professeur Aimé Mabiala, spécialiste de sociologie du tourisme : « Le Congo dispose d’un capital naturel rare. La gouvernance partagée de ces ressources peut devenir un laboratoire pour l’Afrique centrale tout entière. » Une ambition réaliste, à condition de maintenir l’équilibre entre valorisation touristique, impératifs de conservation et aspirations des communautés riveraines.