Un anniversaire sous le signe de la stabilité politique
Le 15 août, date fondatrice de l’indépendance congolaise, offre chaque année l’occasion d’un regard rétrospectif sur l’action publique. Depuis le palais du peuple, à Brazzaville, le président Denis Sassou Nguesso a rappelé la constance d’un impératif : consolider la paix civile pour ouvrir la voie au développement. « La stabilité n’est pas un confort mais un capital productif », a-t-il soutenu, allusion à la capacité du Congo à traverser les tensions régionales sans débordement interne. Dans l’argumentaire présidentiel, le socle institutionnel demeure le vecteur premier d’une croissance durable, comme en témoignent les notations positives de plusieurs agences internationales sur le risque pays ces deux dernières années.
Des chantiers structurants et connectés au Golfe de Guinée
S’appuyant sur des données du ministère de l’Économie, le chef de l’État a mis en avant la livraison successive de corridors routiers, dont l’axe Pointe-Noire–Brazzaville désormais bitumé sur près de 536 kilomètres, et la modernisation du port autonome de Pointe-Noire, plateforme logistique stratégique pour l’hinterland d’Afrique centrale. La pose du tronc commun de la fibre optique avec le Gabon et la République démocratique du Congo place également le pays sur la carte des nœuds numériques du continent, tandis que l’aéroport international de Maya-Maya a retrouvé en 2024 un trafic proche de son niveau pré-pandémique. Ces infrastructures, présentées comme la colonne vertébrale de l’intégration territoriale, visent à réduire le coût des échanges intérieurs de 15 % à l’horizon 2026, selon la Cellule d’exécution des projets routiers.
Diversification économique et pari énergétique
Sans renier le rôle du pétrole, Denis Sassou Nguesso revendique une stratégie de diversification accélérée. Les agropoles d’Oyo, d’Imboulou et de Loudima, soutenus par la Banque africaine de développement, affichent désormais une capacité de transformation annuelle de 120 000 tonnes de manioc et de riz. Dans le bois, la mise en service de deux scieries certifiées FSC à Ouesso confirme la montée en gamme voulue par le gouvernement, qui projette 25 % de valeur ajoutée locale supplémentaire d’ici trois ans. Sur le front énergétique, le complexe hydroélectrique de Liouesso et la ferme solaire de Jacqueville balaient les doutes quant à la capacité du Congo à verdir son mix : 62 % de l’électricité nationale est aujourd’hui d’origine renouvelable, un ratio parmi les plus élevés de la sous-région selon l’Observatoire de l’énergie en Afrique centrale.
Protection sociale et cohésion nationale
« Il est vain de parler de croissance si elle ne se traduit pas dans le quotidien des ménages », a martelé le président, reprenant un leitmotiv ancré depuis l’instauration de la Couverture maladie universelle (CMU) en 2022. Le dispositif revendique 2,8 millions de bénéficiaires, soit près de 60 % de la population, avec une extension programmée aux travailleurs du secteur informel en 2025. En parallèle, le programme Lisungi de transferts monétaires conditionnels a, selon la Banque mondiale, contribué à faire reculer la pauvreté multidimensionnelle de 10,4 % en 2018 à 7,1 % en 2023. L’exécutif souligne par ailleurs l’amélioration ténue mais constante de l’Indice de développement humain, désormais classé dans la catégorie « moyen » selon le PNUD, une première pour le pays.
Diplomatie de bon voisinage et médiations discrètes
Le rayon diplomatique du discours présidentiel s’est voulu rassembleur : main tendue au Gabon pour la relance de la Commission mixte frontalière, appui réitéré à la transition en République centrafricaine et plaidoyer pour une réactivation pragmatique de la CEMAC. « L’intégration n’est pas un slogan mais une mécanique quotidienne », a insisté Denis Sassou Nguesso, rappelant la participation de Brazzaville aux efforts de paix menés par l’Union africaine à Khartoum et à Luanda. Sur le plan climatique, le Congo réaffirme son engagement en faveur de la Commission des bassins des forêts d’Afrique centrale, dont il assure en 2024 la présidence tournante.
Perspectives : un agenda 2025 axé sur la valeur ajoutée
À l’issue de son allocution, le chef de l’État a fixé les jalons d’un agenda 2025 qui entend conjuguer industrialisation légère et innovation technologique. L’accent est mis sur l’économie numérique, avec la création annoncée d’un fonds souverain de capital-risque doté de 50 milliards de francs CFA, et sur la transformation locale du gaz associé, vecteur d’emplois hautement qualifiés. Observateurs et partenaires extérieurs attendent désormais la concrétisation des réformes fiscales destinées à améliorer le climat des affaires. Pour le président, la trajectoire est claire : « Le temps n’est plus à l’émergence hypothétique, mais à l’ancrage d’une prospérité partagée ». Un message que la communauté diplomatique, réunie le soir même à la résidence du ministre des Affaires étrangères, a accueilli avec un mélange de prudence analytique et de respect pour le chemin parcouru.