Suspense autour du scrutin de la FECOHAND
Au terme d’une semaine électrique, les projecteurs sont braqués sur la Fédération congolaise de handball, dont l’Assemblée générale élective, programmée le 16 août, reste incertaine. Entre procédures d’urgence et urgence de procédure, joueurs et dirigeants retiennent leur souffle.
La candidature d’Avicenne Nzikou, d’abord validée puis rejetée par la Commission électorale indépendante, a ravivé les tensions internes. Son conseil, Me Éric Ibouanga, a sollicité la Chambre de conciliation et d’arbitrage du comité olympique pour suspendre le scrutin, estimant des irrégularités persistantes.
Une bataille juridique à rebondissements
Dans une décision rendue le 14 août, le juge sportif a renvoyé le camp Nzikou « à mieux se pourvoir », considérant la première requête insuffisamment étayée. Loin de désarmer, la défense a redéposé un recours dès le lendemain, invoquant l’urgence et le respect du contradictoire.
Le cœur de l’argumentation porte sur la composition même de la Commission électorale indépendante. Pour Me Ibouanga, sa mise en place contreviendrait à une sentence arbitrale du 13 octobre 2024 garantissant l’équilibre entre ligues, clubs et corps de métier du handball congolais.
De son côté, le Comité national olympique et sportif congolais assure que toutes les voies de consultation ont été respectées. Un dirigeant, sous couvert d’anonymat, estime que l’appel de Nzikou relève « d’une stratégie de blocage plus que d’une question de droit ».
Le rôle pivot de la CCAS
Le handball, deuxième sport collectif en popularité après le football, bénéficie d’un soutien croissant des autorités publiques qui y voient un vecteur de cohésion nationale. L’incertitude sur les élections inquiète toutefois les entraîneurs, soucieux de préparer la saison sans querelles institutionnelles.
À Brazzaville, plusieurs capitaines de clubs de Ligue A se sont réunis au centre sportif de Kintélé. « Notre priorité est le terrain, pas les tribunaux », rappelle Joël Dinga du club Inter Club, appelant les acteurs à trouver un compromis pour ne pas pénaliser la relève.
La CCAS doit statuer en audience d’heure à heure, procédure inscrite au nouveau code congolais de règlement des litiges sportifs. Cette mécanique, introduite pour accélérer la justice arbitrale, peut suspendre provisoirement toute mesure susceptible de porter un préjudice irréversible.
Dans la pratique, l’organe arbitral prononce d’abord sur la suspension sollicitée, puis ouvre un examen approfondi du fond. Si les griefs de la partie demanderesse sont recevables, une recomposition de la Commission électorale pourrait être ordonnée, repoussant de plusieurs semaines l’Assemblée générale.
Conséquences sportives et calendaires
En toile de fond, la fédération gère aussi l’échéance des éliminatoires de la CAN 2026, programmées dès janvier. Retarder le vote impliquerait de prolonger le mandat provisoire du bureau sortant, afin d’autoriser l’engagement administratif des sélections masculine et féminine.
Le ministère des Sports, régulièrement consulté sans intervenir directement, rappelle à travers un communiqué que « la transparence élective demeure la meilleure garantie d’une gestion performante ». L’autorité encourage la CCAS à user de toutes ses prérogatives pour préserver la crédibilité du système sportif national.
Vers une gouvernance sportive renforcée
Pour nombre d’analystes, l’affaire FECOHAND illustre la montée en puissance des mécanismes de régulation internes, voulus depuis une décennie par les pouvoirs publics afin d’éviter la judiciarisation internationale des litiges. Cette autonomisation des instances est perçue comme un signe de maturité institutionnelle.
Cependant, certains chercheurs en sociologie du sport rappellent que l’indépendance ne garantit pas l’absence de conflits. « Plus les règles s’affinent, plus les compétiteurs les mobilisent », observe le professeur Léandre Mafoua, relevant une tendance mondiale à la contestation des processus électifs.
Au-delà de la bataille juridique, les enjeux économiques pèsent lourd. Les partenariats signés avec deux sociétés de télécommunication pour la diffusion de la prochaine Super Coupe demeurent conditionnés à la stabilité gouvernementale de la fédération. Tout report prolongé ferait perdre un précieux calendrier marketing.
La passion du terrain face à l’incertitude
Dans les palais des sports de Pointe-Noire à Ouesso, l’enthousiasme des jeunes pousses demeure néanmoins intact. Les académies, soutenues par le programme national Sport-Élite instauré en 2022, poursuivent les entraînements. Les techniciens espèrent que la gouvernance suivra le même tempo que le jeu rapide.
La décision attendue de la CCAS, annoncée dès l’aube du 16 août, donnera le la. Qu’elle valide ou reporte l’Assemblée générale, elle marquera un tournant dans la professionnalisation du handball congolais, un domaine où la passion populaire rencontre de plus en plus la rigueur institutionnelle.
Pour l’heure, supporters et observateurs patientent, conscients que la vitalité démocratique des fédérations sportives est indispensable au rayonnement des couleurs nationales. Dans l’arène, ballon résineux en main, les athlètes se tiennent prêts : l’issue du duel juridique décidera de leur calendrier, pas de leur détermination.
Les prochains mois verront également l’arrivée d’un championnat junior réformé, soutenu par la Confédération africaine. Les observateurs s’accordent à dire qu’une gouvernance clarifiée avant l’automne faciliterait l’obtention de subventions internationales, et renforcerait l’ambition de voir, à moyen terme, une qualification olympique historique. Un cap que le public espère ardemment.