Brazzaville mobilise sa chaîne de valeur extractive
Réunie au cœur de la capitale, la deuxième session annuelle du comité exécutif de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives a réuni, autour du ministre des Finances, du Budget et du Portefeuille public, Christian Yoka, un aréopage composé des opérateurs pétroliers et miniers, de représentants de la société civile et des régulateurs publics. L’objectif affiché consiste à inscrire le Congo-Brazzaville dans le peloton des États respectant l’ensemble des exigences de divulgation prévues par la Norme ITIE 2019, révisée à Dakar en 2023. Les débats, nourris mais courtois, ont confirmé l’alignement stratégique des acteurs sur l’impératif de transparence, perçue tant comme facteur de confiance des investisseurs que comme gage de paix sociale.
Un calendrier resserré pour le rapport 2025
Le comité exécutif a formalisé, à l’issue de plusieurs heures de travaux techniques, une feuille de route conduisant à la publication du rapport d’activités 2025 avant le 31 décembre prochain. Cette échéance témoigne d’une volonté politique assumée. Aux dires du secrétaire permanent, Florent Michel Okoko, « nous devons livrer un document irréprochable sur la période 2023-2024 afin que chaque chiffre tiré des registres douaniers, fiscaux ou contractuels rencontre son équivalent dans les écritures des compagnies ». Ce souci de concordance comptable répond à l’un des critères majeurs du secrétariat international de l’ITIE, lequel salue régulièrement les progrès structurants accomplis par Brazzaville, sans pour autant être encore en mesure de valider définitivement son dossier.
Commissions permanentes : architecture d’un pilotage renforcé
Pour tenir le chronogramme, l’organe national mise sur la création de commissions permanentes, vouées à traiter, en flux continu, les problématiques de collecte des données de production, d’enregistrement des paiements et de diffusion publique. Selon un conseiller du ministère des Hydrocarbures, ces structures ad hoc permettront de « sortir du cycle de l’urgence et d’installer une culture de reddition proactive ». Elles associeront statisticiens, juristes et économistes afin de consolider les tableaux de bord et d’anticiper les points d’audit les plus sensibles, tels que les exonérations fiscales ou les accords de partage de production.
Mesures correctives : un an pour convaincre l’ITIE internationale
Au-delà de la publication des rapports, l’enjeu cardinal demeure la validation officielle du pays. Sur les quinze recommandations formulées lors de la dernière évaluation externe, six demeurent partiellement implémentées, notamment la désagrégation par projet des revenus, la transparence sur la propriété réelle et la traçabilité des flux infra-budgétaires. Florent Michel Okoko se montre néanmoins confiant : « Nous possédons le capital humain et l’ambition nécessaire pour achever ces ajustements d’ici à douze mois ». Dans cette perspective, le gouvernement compte intensifier le dialogue interinstitutionnel et solliciter, au besoin, l’appui technique de partenaires bilatéraux, à l’instar de la Banque africaine de développement ou de l’Union européenne.
Vers un nouvel âge de la gouvernance extractive congolaise
Au fil des cinq dernières années, le Congo a déjà démontré sa capacité d’adaptation réglementaire, en transposant dans son droit interne plusieurs dispositions relatives à la publication des contrats et des bénéficiaires effectifs. Cette dynamique, jugée encourageante par de nombreux observateurs, s’inscrit dans une vision de long terme portée par le président Denis Sassou Nguesso, qui a réaffirmé, lors de la semaine nationale de l’industrie, son souhait d’associer attractivité économique et intégrité institutionnelle. À mesure que s’approche la date butoir de décembre 2024 pour le second rapport d’activités puis celle de décembre 2025 pour le rapport global, Brazzaville joue une partie décisive : crédibiliser son secteur extractif pour sécuriser les investissements structurants indispensables à sa stratégie de diversification économique.
Confiance des investisseurs et attentes citoyennes
Les marchés financiers, comme les sociétés civiles, scrutent désormais avec la même acuité la transparence des recettes extractives. En publiant dans les délais des rapports exhaustifs, le Congo espère se positionner avantageusement dans la compétition régionale, où les annonces de découvertes pétrolières et minières se multiplient. L’enjeu n’est pas seulement de dévoiler des chiffres, mais de consolider un pacte social reposant sur la redistribution équitable des rentes. La réussite du calendrier ITIE pourrait ainsi préfigurer un modèle de gouvernance où les impératifs de compétitivité se conjuguent à ceux de la responsabilité publique.