Un baptême politique attendu
Sous les tonnelles du siège de Moungali, quatrième arrondissement de Brazzaville, Jean-Bonnard Moussodia a officialisé, le 25 octobre 2025, la naissance politique du Rassemblement des démocrates panafricains, ba-dia-nséké, plus simplement RDP.
Le nouveau parti, fruit d’un long processus amorcé en novembre 2024, s’est réuni en assemblée générale constitutive le 28 décembre 2024, bouclant ainsi des mois de concertations internes et de validations administratives.
«Le RDP est un parti d’opposition et fera une opposition constructive», a résumé son président devant la presse, décrivant une formation déterminée à s’inscrire dans le débat républicain plutôt qu’à la rupture frontale.
Ce choix de ton tranche avec les tiraillements qui avaient suivi le décès de Guy-Brice Parfait Kolélas, quand l’Union des démocrates humanistes-Yuki avait vu s’opposer courants et ambitions personnelles.
Un héritage assumé
Devant les journalistes, Jean-Bonnard Moussodia a ouvert son propos par une minute de silence à la mémoire de celui qu’il appelle encore «Ya Pako», rappelant que le nom de Kolélas continue de résonner dans «le cœur des Congolais épris de justice et de liberté».
Dans un hommage plus large, il a salué l’abbé Fulbert Youlou et Jacques Opangault, «pères fondateurs de l’unité nationale» qui, dit-il, surent dépasser leurs contradictions pour placer le Congo-Brazzaville au centre.
Pour Moussodia, adhérer à cette filiation revient à reprendre le flambeau du «Plan Parfait pour le redressement du Congo», projet de société conçu par Kolélas et désormais érigé en boussole stratégique du RDP.
Une idéologie libéral-humaniste
Le RDP ba-dia-nséké se réclame du libéral-humanisme, une matrice qui place l’être humain au cœur de l’action publique tout en valorisant l’initiative individuelle et la responsabilité collective.
Selon son fondateur, cette orientation répond aux aspirations d’une jeunesse tournée vers l’entrepreneuriat, mais aussi aux impératifs de cohésion nationale dans un contexte de mutations économiques et climatiques.
«Nous croyons à la liberté individuelle, mais nous ne nions pas la solidarité», insiste-t-il, convaincu que le libéral-humanisme peut concilier efficacité et justice sociale à l’échelle congolaise.
Défis d’implantation nationale
L’obtention du récépissé légal n’est qu’une première étape, reconnaît Jean-Bonnard Moussodia, qui admet que le RDP reste absent de plusieurs départements, notamment dans le nord et le centre du pays.
Le parti prévoit des tournées de sensibilisation, la formation de relais locaux et la diffusion du corpus idéologique pour donner «de la visibilité» à ses actions d’ici les prochaines échéances électorales.
À Moungali, siège national, une équipe chargée d’accompagner cette expansion veille déjà à la conformité des nouvelles sections avec le cahier des charges fixé par la législation congolaise sur les partis politiques.
Vers une opposition constructive
Interrogé sur la nature de son engagement, le président du RDP assure vouloir se tenir «à équidistance des excès» en privilégiant la critique argumentée et le dialogue institutionnel.
Cette posture, insiste-t-il, n’exclut pas la fermeté: le parti défendra les droits démocratiques, mais sans entraver l’action des autorités lorsqu’elle sert l’intérêt général.
À ses yeux, le pluralisme authentique passe par la reconnaissance mutuelle de la légitimité des acteurs, une reconnaissance qu’il dit tenir du chef de l’État, lequel a, rappelle-t-il, toujours encouragé la diversité des points de vue dans le cadre républicain.
En choisissant d’ériger Guy-Brice Parfait Kolélas en guide idéologique, le RDP entend inscrire son action dans la durée, tout en s’inventant une trajectoire propre, à l’image du fondateur qui avait quitté le MCDDI pour créer l’Udh-Yuki.
La symbolique ba-dia-nséké
Le suffixe ba-dia-nséké, emprunté au lingala, signifie «la main dans la main», précise Moussodia, soulignant que cette dimension fraternelle rappelle la vocation panafricaine du mouvement et l’idée d’une union transversale au-delà des clivages régionaux et générationnels.
Dans les statuts, l’article 27 consacre Kolélas au rang de «guide idéologique», une décision votée à l’unanimité lors de l’assemblée de décembre 2024, afin de «donner un sens au sacrifice suprême de l’humaniste, nationaliste et démocrate», selon le texte.
Pour les cadres du RDP, cette référence n’est pas une sanctification figée mais un appel permanent à la cohérence: «Notre guide avait quitté le MCDDI pour innover, nous créons le RDP pour restaurer et reconstruire», rappelle le président, comme pour légitimer la scission.
Une organisation en gestation
Sur le plan interne, le parti s’articule déjà autour d’un bureau politique, d’un secrétariat permanent et de cellules thématiques chargées de la citoyenneté, de l’économie et de l’environnement, autant de commissions appelées à formuler des propositions sectorielles.
Une école du parti, en cours de conception, doit former les futurs cadres aux techniques d’animation de réunions, à la prise de parole publique et à la maîtrise du projet libéral-humaniste, afin d’assurer l’homogénéité de la doctrine sur l’ensemble du territoire.
Moussodia, ancien député, mise également sur son expérience parlementaire pour structurer un réseau d’experts capables de rédiger propositions de loi, notes budgétaires et argumentaires sectoriels, «parce que l’opposition constructive ne se limite pas aux slogans», souligne-t-il.
